Motion M-241 :
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC/RD)

37e Législature, 1ère Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 117
Le jeudi 22 novembre 2001

LES ACADIENS

M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC/RD): Monsieur le Président, je tiens à offrir mes félicitations à mon cher ami et collègue, et aux autres députés qui participent à ce débat.

Peter MacKay

[Traduction]

La motion qu'a présentée le député de Verchères-Les-Patriotes est une motion importante, qui traduit beaucoup d'émotion pour le peuple acadien.

La motion, et l'amendement, ne porterait atteinte ni au gouvernement, ni à la Couronne britannique ni à la monarchie. Elle présente tout simplement une demande très raisonnable pour que soient reconnus les préjudices et les horreurs dont le peuple acadien a souffert.

[Français]

C'est avec plaisir que j'interviens à la Chambre cet après-midi pour donner mon appui à la motion proposée par mon collègue du Bloc québécois, le député de Verchères--Les-Patriotes.

D'aucuns sont peut-être surpris de voir un anglophone de la Nouvelle-Écosse se prononcer en faveur de cette motion. Après tout, certains ont peut-être été tentés de voir dans celle-ci un affront à la Couronne britannique, au gouvernement fédéral ou même au Canada anglais.

Cependant, à la troisième heure de débat sur cette question, il est clair que ce n'est tout simplement pas le cas. Cette motion ne vise nullement le gouvernement fédéral et ne constitue pas un affront à l'image de la Couronne. Après tout, la Couronne a elle-même exprimé ses excuses à certains peuples pour des actes semblables commis en son nom.

[Traduction]

J'appuie cette motion. Il s'agit d'une politique officielle, d'un geste dont nous devrions faire bénéficier le peuple acadien, afin de reconnaître les préjudices qui lui ont été causés entre 1755 et 1763. Il s'agit d'une déclaration de reconnaissance d'une tragédie qui est inextricablement liée à son histoire, une histoire dont il est fier. Il s'agit tout simplement d'un acte qui reconnaît qu'un effort effroyable de purification ethnique a été déployé. Si une tragédie de cette ampleur se produisait aujourd'hui, elle serait horrifiante et difficile à comprendre.

À mon avis, l'auteur de la motion reconnaît qu'il n'est pas question de créer un précédent. La motion ne vise pas à demander une indemnisation financière ou à récupérer des terres. De toute évidence, cela risquerait d'entraîner le déplacement d'autres personnes et de leur causer d'autres préjudices. Cependant, nous reconnaissons et estimons que des excuses sont de mise.

Nous estimons qu'il est temps de reconnaître 1755, cette année d'infamie, qui a vu l'expulsion des Acadiens, le Grand dérangement. Il est tout simplement temps. Il est temps que nous reconnaissions cette tragédie qui a entraîné l'expulsion de 6 000 à 10 000 personnes de leur foyer, obligeant des familles à être séparées. Comme on le sait, et pour ceux qui ne le savent pas, leurs maisons ont été incendiées. Les digues qu'elles avaient construites, témoignage d'un travail manuel épuisant, se trouvent toujours dans la baie de Fundy, près de Grand-Pré, en Nouvelle-Écosse.

À son apogée, en 1749, l'Acadie comptait près de 12 000 habitants. Entre 1749 et 1753, les tensions entre les Français et les Britanniques s'accrurent et environ 2 000 Acadiens furent pris entre les deux. Craignant le pire, beaucoup d'entre eux quittèrent la région et se réfugièrent en territoire français, en des endroits comme l'Île Saint-Jean, aujourd'hui l'Île du Prince-Édouard, l'Île Royale, aujourd'hui le Cap-Breton, et ailleurs au Québec.

La Guerre de sept ans allait bientôt commencer, et les Britanniques ne voulaient pas que la possibilité que des Français vivent dans les territoires nuise à ces guerres coloniales. Le fait est que les Acadiens ne voulaient appuyer ni l'un ni l'autre camp. Ils voulaient simplement vivre leur vie. Ils voulaient cultiver la terre. Ils voulaient mener une existence paisible, et c'est exactement ce qu'ils faisaient. On le leur demanda à plusieurs reprises au fil des années, mais les Acadiens refusèrent toujours, par principe, de signer un acte d'allégeance à l'un ou l'autre gouvernement. Ils voulaient seulement cultiver leurs terres.

Les Acadiens vivaient en Amérique du Nord depuis si longtemps qu'ils avaient cessé de se considérer comme des colons français. Ils avaient développé leur propre langue, leur propre culture. Ils formaient un véritable peuple, les Acadiens, un peuple très fier. Ils n'avaient pratiquement aucun lien avec l'un ou l'autre gouvernement et ne voulaient pas être forcés de prendre parti.

C'est en 1755, sous le gouverneur britannique Lawrence, que la déportation a eu lieu. On a rassemblé les gens. On a séparé les familles. On a entassé tout ce monde comme du bétail sur des bateaux qui ont pris la mer. Les atrocités de la déportation sont relatées dans le récit épique de Longfellow. Une statue en hommage au peuple acadien est érigée à Grand-Pré, en Nouvelle-Écosse.

Les Acadiens ont été traités cruellement au moment de la déportation. Comme je l'ai dit, leurs maisons ont été brûlées, et on estime qu'entre 3 000 et 4 000 ne se sont pas enfuis ou n'ont pas été déportés avant 1755. Ils furent cependant nombreux à mourir malades ou à parcourir l'Amérique du Nord pendant des années à la recherche de leurs proches. La plupart des Acadiens avaient quitté la province. Nombre d'entre eux, qui s'étaient cachés, ont dû entreprendre à leur tour cette aventure déchirante d'essayer de retrouver leur famille.

Les déportés ont été dispersés sur la côte est de l'Amérique du Nord. Nombre d'entre eux ont été envoyés au Massachusetts, en Géorgie, d'autres en Louisianne, au Québec et ailleurs en Amérique du Nord. Le gouverneur Lawrence n'ayant pas informé les autres colonies de l'arrivée des déportés, ceux-ci débarquaient sans être attendus nulle part. Ils étaient victimes de préjugés, et les colonies anglaises ne voulaient pas d'eux, estimant trop cher de s'en occuper. C'est ainsi que des Acadiens ont passé de longues périodes en mer et ont enduré des souffrances et des privations atroces.

Certains ont réussi à se sauver des Anglais et d'autres ont réussi à atteindre les territoires français de l'Île-Royale et de l'Île Saint-Jean. D'autres ont regagné la Nouvelle-Écosse, où Tracadie, Pomquet et Havre Boucher sont toujours des enclaves acadiennes. D'autres encore se sont certainement retrouvés sur la rive sud de la Nouvelle-Écosse où vivent aujourd'hui de nombreux Acadiens.

Comme je l'ai dit, la souffrance des Acadiens, leur peine et leur lutte pour rentrer chez eux sont décrites dans le poème épique de Longfellow intitulé Évangéline.

Les Acadiens qui ont eu assez de chance pour pouvoir revenir en Nouvelle-Écosse n'ont pas pu retourner directement sur les terres dont ils avaient un jour été propriétaires. Elles étaient devenues la propriété d'anglophones.

Même après des années de guerre et après que les conflits entre les Britanniques et les Français eurent enfin connu leur dénouement, les Acadiens ont été abandonnés. On les a laissés se débrouiller seuls.

Les terres dont ils avaient été dépossédés étaient occupées. Même s'il ne s'agissait pas de terres riches, c'était des terres que leurs ancêtres avaient cultivées. C'était des terres auxquelles ils étaient attachés émotivement. Leurs ancêtres avaient sué sang et eau sur ces terres, y aménageant les remarquables aboiteaux qui existent encore aujourd'hui et qui témoignent de leurs efforts et de leur travail acharné. Les concessions de terres accordées aux Acadiens étaient généralement situées aux extrémités de la province.

Le moment est venu que nous nous penchions sur cet événement historique et que nous réglions la question. Cette motion qui a été présentée de bonne foi et d'une manière très générale nous donne l'occasion de le faire. C'est une motion sur laquelle nous autoriserons nos députés à voter librement. C'est une motion qui fait appel à la conscience de chacun. J'encouragerais tous les députés, notamment ceux qui sont fiers de leurs ancêtres acadiens et ceux qui ont parlé de la motion, à appuyer cette dernière. C'est une excellente motion.

[Français]

Encore une fois, je félicite mon ami pour sa motion originale. C'est extraordinaire. C'est exceptionnel.

M. Mauril Bélanger: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'aimerais que vous demandiez s'il y a consentement unanime pour que deux autres députés puissent prendre la parole sur cette motion, soit le député de Repentigny et moi-même.

Le vice-président: Est-ce que le député de Ottawa--Vanier a le consentement unanime de la Chambre?

Des voix: D'accord.

* * *

[Traduction]

Les travaux de la Chambre

[Travaux de la Chambre]

L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, d'autres consultations ont eu lieu entre les partis politiques pour essayer de repousser l'échéance de la production des amendements à l'étape du rapport. Je propose:

Que, nonobstant l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui relativement à l'étape du rapport du projet de loi C-36, l'heure de tombée pour donner avis de motions d'amendement à l'étape du rapport soit reportée de nouveau au samedi 24 novembre 2001, à 18 heures.

Cela donne quelques heures de plus que ce qui était prévu.

Le vice-président: Le ministre a-t-il le consentement de la Chambre pour proposer la motion?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

* * *

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