Motion M-241 :
M. Peter Stoffer (Sackville--Musquodoboit Valley--Eastern Shore, NPD)

37e Législature, 1ère Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 091
Le mercredi 3 octobre 2001

LES ACADIENS

[Traduction]

M. Peter Stoffer (Sackville--Musquodoboit Valley--Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, je suis très heureux de pouvoir participer à la Chambre au débat sur la motion no 241, au nom des Acadiens de West Chezzetcook et de Grand Desert, en Nouvelle-Écosse.

Peter Stoffer

Je trouve inacceptable et honteux que le député de Tobique--Mactaquac, que je respecte énormément par ailleurs, se serve de cette motion sérieuse et empreinte de compassion pour se livrer à de la politicaillerie. Le député de Lanark--Carleton essaie quant à lui de réécrire l'histoire.

Il n'y a probablement jamais personne de son caucus qui s'est rendu à Grand Pré et qui a lu les 300 noms gravés sur la pierre dans l'église de Grand Pré, laquelle est située à Wolfville, en Nouvelle-Écosse.

C'est l'un des plus beaux endroits au Canada. C'est un lieu de recueillement. C'est une sorte de Saint-Graal que tous les Acadiens viennent voir lorsqu'ils se rendent en Nouvelle-Écosse. Les gens viennent du monde entier à Grand Pré pour rendre hommage à ceux qui ont été chassés en 1755 et pour prier pour eux. C'est une honte que de se servir de cette motion pour faire de la politicaillerie comme le font ces gens-là.

Tout ce que nous demandons c'est que la Chambre des communes envoie un message à la reine, par l'entremise du Parlement, pour demander des excuses. Aucune date n'est précisée. Il n'est pas nécessaire que cela se fasse dès demain. Nous demandons seulement que cette question soit sérieusement prise en considération.

La reine fera une visite au Canada en 2002. Le Festival acadien aura lieu en Nouvelle-Écosse en 2004 et il y a un autre festival en 2005. La reine a amplement de temps pour prendre une décision. Nous devons laisser à la monarchie le temps de réfléchir à cette question et de la prendre sérieusement en considération. Nous ne devrions pas nous servir de cette motion pour faire de la politicaillerie. C'est une honte de nous retrouver coincés ainsi. Il n'est pas étonnant que de nombreuses minorités de notre pays, y compris les Acadiens, n'espèrent plus rien du Parlement.

Toutes les associations acadiennes appuient la motion. Il est vraiment trompeur que le ministre responsable des langues officielles, pour qui j'ai le plus grand respect, prétende qu'aucun groupe acadien n'appuie la motion. Ce n'est tout simplement pas vrai, car toutes les associations l'appuient.

Les Acadiens ne réclament qu'une chose, et c'est la réparation d'un tort historique. Le pape a présenté des excuses au peuple juif pour l'expulsion des juifs pendant la guerre. Les Églises canadiennes ont présenté des excuses au sujet des pensionnats. M. Mulroney, un ancien premier ministre, a présenté des excuses devant la Chambre pour l'internement des Japonais pendant la guerre.

En ces temps de compassion et de pardon, nous devrions présenter des excuses au nom de la reine, quand elle viendra au Canada ou par tout autre moyen dont elle décidera, pour l'expulsion des Acadiens en 1755.

Il est tout simplement ridicule de présumer que le roi de l'époque n'était pas informé des actions menées dans ses colonies. C'est de la foutaise et c'est totalement inadmissible.

Je dois dire à quel point nous étions fiers, en Nouvelle-Écosse, quand le gouverneur général du Canada, Roméo LeBlanc, un homme fier et distingué, est devenu le premier Acadien à accéder aux plus hautes fonctions de notre pays. Je suis également fier de voir que son fils siège au Parlement aujourd'hui.

Le Nouveau Parti démocratique a lui aussi eu une grande première. En 1997, les deux premiers Acadiens à se faire élire aux Communes sous la bannière du Nouveau Parti démocratique ont été le député d'Acadie--Bathurst, le whip de notre parti, et Angela Vautour, une ancienne députée qui a changé de camp. Ce sont deux Acadiens qui étaient très fiers de se présenter au Nouveau-Brunswick sous la bannière des Acadiens.

Nous sommes très fiers de les avoir eus au sein de notre groupe parlementaire. Nous sommes très fiers de notre whip et du bon travail qu'il accomplit. Il apporte tous les jours à notre caucus et aux Communes la passion et le dynamisme de la communauté acadienne. Je suis persuadé que nous l'entendrons pendant bien des années encore à la Chambre des communes.

Il est également remarquable que le ministre d'État chargé de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, qui représente Ouest Nova, ne soit pas favorable à la motion. La circonscription de Ouest Nova témoigne de la fierté et du savoir-faire exceptionnel des Acadiens. Leur drapeau, leur langue et leur culture sont omniprésents.

Les membres des deux communautés que je représente, West Chezzetcook et Grand Desert, sont très fiers d'être des Acadiens et de faire partie de la Nouvelle-Écosse et de notre grand pays, le Canada.

Il est remarquable que le ministre responsable de l'APECA refuse d'appuyer la motion, alors que cet organisme vient tout juste de donner 4 millions de dollars au site de Grand Pré. Le gouvernement a donné 4 millions de dollars de l'argent des contribuables pour améliorer le site, notamment sa dimension historique. Le ministre accepte de donner de l'argent pour soutenir cette communauté, mais par ailleurs il fait preuve d'hypocrisie en refusant d'appuyer la motion. C'est tout à fait incroyable.

Je recommande aux députés qui veulent vraiment savoir ce qu'est la culture acadienne de visiter Grand Pré, en Nouvelle-Écosse. Ils ne seront pas déçus. Mes collègues pourront ensuite se rendre dans des villages acadiens situés un peu partout en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick, dans certaines parties de l'Île-du-Prince-Édouard et partout où vivent des Acadiens.

Les actes commis contre les Acadiens entre 1755 et 1763 étaient un péché. Des milliers de personnes ont été chassées de leurs terres. Il s'agissait de gens laborieux, qui ne voulaient rien avoir à faire avec la guerre. Ils désiraient seulement cultiver leurs terres, s'occuper de leurs enfants et vivre en paix. On le leur a refusé, parce qu'ils n'ont pas voulu prêter serment au roi. Les autorités leur ont dit: vous êtes avec nous ou contre nous. Ils ont été chassés de chez eux.

Les députés peuvent imaginer ce qui s'est passé. Toutes ces familles ont beaucoup souffert. Certaines ont été séparées. Joe Jacquard, de Wedgeport, en Nouvelle-Écosse, me racontait que son arrière-arrière-grand-père avait dû se cacher dans la forêt pour échapper aux Anglais.

La tradition orale a permis à de nombreux Acadiens de conserver l'histoire de leurs familles. Les noms des familles originales se trouvent dans l'église de Grand Pré. Je recommande à tous les députés d'y jeter un coup d'oeil, en particulier au député de Lanark--Carleton, qui a tenu des propos déplorables. Je reconnais qu'il a le droit d'exprimer son opinion à la Chambre des communes, mais il est insensé de tenter de réécrire l'histoire et d'affirmer que notre génération n'est pas responsable de faits qui sont survenus dans le passé. Je m'inscris en faux contre les propos du député, car il a tort.

Bien des choses sont arrivées à cause de cet événement. Ma femme vient de Longueuil, au Québec, et ma fille est en immersion française totale. Ce que les Acadiens ont apporté à ma famille est absolument fabuleux. Je sais que je ne maîtrise pas l'anglais, sans parler du français, mais je ne saurais trop remercier les Acadiens de ma province de leur apport non seulement à nos localités mais aussi à notre mode de vie et à notre diversité culturelle.

Nous avons parlé récemment de la diversité culturelle au Canada grâce aux éléments arabes et musulmans de notre population. Nous ne devrions pas oublier que les Acadiens eux-mêmes nous ont apporté une diversité culturelle fabuleuse, fantastique. Nous avons une dette envers eux. Chacun d'eux, par le truchement de leurs associations, demande qu'on adopte cette motion. J'encourage de nouveau la Chambre à réfléchir soigneusement à la motion, à faire simplement abstraction des considérations politiques afin de réfléchir à ce que nous devrions faire pour réparer un tort historique.

Tout ce que demandent les Acadiens, c'est la possibilité d'obtenir des excuses de la part de la reine et de permettre à la Reine de les présenter elle-même. Il faut que la Chambre fasse preuve de la maturité nécessaire pour tenir ce débat, adopter la motion dans un esprit positif et laisser Sa Majesté prendre la décision. Ce n'est pas à nous de prendre la décision, et nous ne devrions pas faire intervenir de sordides considérations politiques dans le débat.

Monsieur le Président, je ne saurais trop vous remercier de m'avoir permis d'intervenir aujourd'hui dans le débat de cette motion au nom de tous les Acadiens de West Chezzetcook et de Grand Desert et d'ailleurs dans ma circonscription, et notamment au nom de mon collègue, Kevin Deveaux, lui-même Acadien et député élu à l'assemblée législative provinciale de la Nouvelle-Écosse, et au nom de beaucoup d'autres.

Nous intervenons à la Chambre pour appuyer la motion no241 et appuyer également notre excellent collègue d'Acadie--Bathurst. Je ne puis dire son nom, mais il est aussi notre whip.

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