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Éditorial : Opération M-241 infinie
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Michel Doucet, L'Acadie Nouvelle - 5 octobre 2001
Le monde merveilleux de la politique n'en est pas à une contradiction près, chacun le sait. Et pour certains professionnels du domaine, il est sans doute préférable qu'il en soit ainsi. À l'heure où tous ces gens nous chantent qu'il faut se serrer les coudes contre le terrorisme, par exemple, les libéraux francophones à Ottawa, eux, continuent de jouer sur un quelconque ressentiment de la part des Acadiens à l'endroit des Québécois. Des séparatistes, plus précisément. Le triste spectacle offert par la députation néo-brunswickoise, mercredi soir, aux Communes, s'est maintenu dans une certaine «logique». En ce sens que certains élus d'ici ne brillent pas plus aujourd'hui qu'il y a six mois. Il est évidemment question de la motion M-241 portant sur les excuses de la Couronne britannique. Que les «vedettes» du PLC d'ici aient été d'abord surprises de la démarche du député Stéphane Bergeron du Bloc québécois, le printemps dernier, passe encore. Nous sommes plusieurs à pouvoir en dire autant, après tout. Qu'ils persistent aujourd'hui à maintenir une attitude bêtement soumise à la volonté du premier ministre et de ses valets, c'est autre chose. On ne s'attendait pas à ce que les libéraux changent soudainement d'idée et appuient la requête du député de Verchères-Les-Patriotes. On aurait néanmoins pu espérer qu'il présentent des arguments plus étoffés pour s'y opposer. Quelque chose qui aurait pu ressembler à de la dignité de leur part. Il faudra repasser. Usant d'une rhétorique qui serait trop vétuste pour trouver place au Village historique acadien, nos superstars ont pris leur air le plus indigné pour répéter que M. Bergeron tentait d'utiliser le peuple acadien pour satisfaire quelque sombre dessein. C'est tout juste s'ils n'ont pas mis un masque à gaz pour en parler en Chambre. Plus mauviette que ça... Cette attitude des Bradshaw, LeBlanc, Savoy et Castonguay à l'endroit du BQ a dépassé depuis longtemps le stade du ridicule. Madame, messieurs, songez que vous nous représentez à Ottawa. Faites un effort. Si la chose ne vous vient pas naturellement, faites au moins semblant de vous élever un peu. M. Bergeron est un Acadien d'origine. Comme de plus en plus d'autres Acadiens, il estime que la Couronne britannique doit reconnaître les torts causés à notre peuple lors du Grand dérangement. Après un départ quelque peu erratique, il a su présenter ses arguments de façon claire, ralliant à sa cause le milieu associatif, notamment. Si les fédéraux libéraux néo-brunswickois tiennent à tout prix à leur position, libre à eux de s'user les genoux, après tout. Qu'ils nous évitent au moins de montrer au reste du pays à quel point ils peuvent manquer de courage. M. Bergeron a tendu la main au gouvernement Chrétien. Le libellé de sa proposition pourrait quasiment être modifié à leur aise. Comment ces gens peuvent-ils rater pareille occasion! Allez-y, madame, messieurs! Plus tard, vous raconterez à qui voudra l'entendre que vous avez courageusement appuyé votre gouvernement dans ses efforts contre le terrorisme. Et lorsqu'on vous demandera ce que vous avez fait avec la motion M-241, que répondrez-vous?
micheld@acadienouvelle.com
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