LA GRANDE-BRETAGNE NOUS DOIT DES EXCUSES

Nelson Landry, L'Acadie-Nouvelle, le 28 septembre 1988, page 8

En présentant ses excuses « officielles et sincères » à la communauté nippo-canadienne pour les torts dont ses membres ont été victimes pendant la Deuxième Guerre mondiale, le gouvernement canadien a enfin rendu justice à ce peuple.

II aura fallu plus de 40 ans, mais les Nippo-Canadiens ont au moins la satisfaction aujourd'hui de voir leur gouvernement (car ils sont des Canadiens à part entière) reconnaître la grossière erreur que le pays tout entier a commis pendant les années 40.

Les Nippo-Canadiens, victimes du backlash nord-américain à la suite des évènements de Pearl Harbour, ont été dépouillés de leur respect, de leur liberté et de leurs droits. Justice devait éventuellement être faite et le gouvernement de Brian Mulroney mérite certes des félicitations à cet égard.

Toutefois, dans la foulée de ces excuses et de la compensation monétaire offerte aux Nippo-Canadiens, il est légitime pour les Acadiens. du Nouveau-Brunswick, des autres provinces Maritimes, de la Louisiane, et d'ailleurs, de ressentir une certaine envie. Si les Nippo-Canadiens ont obtenu une certaine justice après 40 ans, les Acadiens rongent leur frein depuis 233 ans. La communauté nippo-canadienne a été perturbée lorsque le gouvernement lui a confisqué ses biens et ses propriétés pour déporter ou interner ses membres.

Quelque 200 ans auparavant, un autre peuple avait subi le même sort au Canada. Point n'est besoin d'aller dans les détails. Les livres d'histoire en ont amplement parle, le patrimoine acadien en témoigne et la lutte des Acadiens, qui se poursuit d'ailleurs encore aujourd'hui, pour obtenir leurs droits a été façonnée par la Déportation (Le Grand dérangement) de 1755.

Le ministre d'État Gerry Weiner a affirmé la semaine dernière que toute communauté ethnique ou autre qui croit avoir été lésée comme les Nippo-Canadiens peut en faire état au gouvernement fédéral qui étudiera la demande.

S'il y a un peuple au Canada qui a été lésé au cours de son histoire, c'est bien le peuple acadien!

Le gouvernement fédéral n'est pas responsable de ce qui s'est produit en 1755. Le Canada n'existait même pas à cette époque. Il s'agissait seulement d'une colonie britannique.

Étant aujourd'hui un pays autonome, le Canada peut exiger de la Grande-Bretagne qu'elle reconnaisse au moins officiellement les torts qu'elle a causés aux Acadiens en 1755 en les dispersant aux quatre vents, en séparant des familles et en forçant des milliers de nos ancêtres à se cacher pendant cent ans dans les bois pour éviter une mort certaine. Nos ancêtres ont vécu un traumatisme égal, sinon supérieur, à celui qu'ont connu les Nippo-Canadiens.

La Grande-Bretagne doit des excuses aux Acadiens et le gouvernement fédéral devrait porter un message a Buckingham Palace demandant à la reine de s'excuser auprès d'eux au nom de ses ancêtres de la monarchie anglaise.

Des excuses officielles - et espérons-le sincères de la Grande-Bretagne ne corrigeraient en rien les torts commis à l'endroit des Acadiens, mais ce serait au moins un geste symbolique de valeur.

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