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MATHIEU DA COSTA ET LES DÉBUTS DU CANADA : POSSIBILITÉS ET PROBABILITÉS
par A. J. B. Johnston
Parcs Canada, Halifax
Mathieu Da Costa et les débuts du Canada (1)
Il arrive parfois que ce que nous ignorons soit encore plus fascinant que ce que nous savons. L'histoire de Mathieu Da Costa et le rôle qu'il aurait joué lors des premiers voyages d'exploration au Canada en sont un exemple probant.
Les documents historiques parvenus jusqu'à nous expliquent, ou permettent de penser, que Mathieu Da Costa est un Noir libre engagé par les Européens, plus précisément les Français et les Hollandais, au début des années 1600 à titre de traducteur-interprète lors de leurs voyages d'exploration en Amérique du Nord. Un différend éclate entre les Français et les Hollandais au sujet de ses services, et finit par aboutir devant les tribunaux en France en 1609; l'affaire traîne jusqu'en 1619. Les documents historiques donnent bien d'autres détails, mais qui ne permettent pas de déterminer avec exactitude où et quand Mathieu Da Costa aurait travaillé en qualité d'intermédiaire le long des côtes du Canada atlantique. Cela n'a cependant pas empêché certains auteurs d'affirmer qu'il se trouvait à Port-Royal au début des années 1600 (2). Cette affirmation se fonde sur le fait que Da Costa a signé un contrat l'engageant à travailler en qualité d'interprète pour Pierre Dugua de Mons (parfois écrit Du Gua de Monts), qui dirigeait les expéditions de colonisation organisées par les Français à Sainte-Croix en 1604 et à Port-Royal en 1605 (3). L'argument du contrat n'est nullement convaincant, car le document, signé à Amsterdam en 1608, ne prenait effet qu'au début de 1609. Il n'est malheureusement fait aucune mention dans aucun document subséquent qui permette de confirmer que l'interprète a bel et bien traversé ensuite l'océan comme le stipulait le contrat.
Cette preuve partielle de la présence de Mathieu Da Costa pose donc problème à toute personne soucieuse d'établir avec précision où et quand au début de la colonisation du pays l'interprète aurait voyagé et travaillé. En admettant que nous puissions faire abstraction de tout soucis d'exactitude, ce qui n'est pas facile pour un historien, nous en convenons, ce ne serait pas les possibilités qui manqueraient pour expliquer le rôle de ce mystérieux personnage dans l'histoire du Canada. Nous commencerions en Afrique, un siècle ou plus avant la naissance de l'homme que nous connaissons sous le nom de Mathieu Da Costa (4).
Exploration et commerce par les Européens le long de la côte occidentale de l'Afrique
Il est essentiel de connaître la situation qui prévaut en Afrique au moment où les Européens y entreprennent leurs voyages d'exploration pour comprendre comment et pourquoi Mathieu Da Costa s'est fort probablement retrouvé le long des côtes du Canada atlantique au tournant du XVIIe siècle.
Dans les années 1440, les navigateurs et les marchands portugais commencent à s'aventurer au-delà de l'Afrique du Nord, région qu'ils connaissent depuis longtemps, vers Madère, les Îles Canaries et d'autres îles situées loin au large des côtes du Maroc. Au cours des années subséquentes, ils descendent toujours plus bas le long de la côte occidentale de l'Afrique, et finissent par atteindre la Côte-de-l'Or (aujourd'hui le Ghana) en 1470 (5). À l'origine, les Portugais cherchent à faire du commerce avec les Africains pour se procurer de l'or, et, plus tard, du poivre et d'autres produits, mais un commerce d'esclaves se développera bientôt, qui aura des conséquences des plus tragiques au fil des siècles, puisque des millions d'Africains vont traverser l'Atlantique à la suite de l'établissement dans les Amériques d'économies fondées sur les plantations de canne à sucre, de tabac et de coton qui emploient une main-d'oeuvre composée essentiellement d'esclaves.
Bien avant cette époque, au XVe siècle, les Portugais avaient déjà trouvé le commerce le long de la côte atlantique de l'Afrique tellement lucratif qu'ils avaient même essayé de cacher leurs échanges aux autres nations européennes, au point où ils avaient interdit à leurs marins de parler de leurs voyages et limité la diffusion des cartes de la région. Le secret ne fut que de courte durée, et la rumeur de ces échanges lucratifs se répandit tant et si bien que des marins de Hollande, d'Angleterre et de France entreprirent à leur tour des expéditions commerciales. Ces puissances colonisatrices allaient bientôt supplanter en grande partie le Portugal en Afrique, et l'intégration du Portugal à l'Espagne entre 1580 et 1640 allait précipiter la fin des activités commerciales portugaises.
Les interprètes africains
À l'époque des premiers contacts, les Portugais et les peuples vivant le long de la côte occidentale de l'Afrique n'ont aucune langue commune. Les gestes sont certainement le premier moyen de communiquer et de faire des affaires, le dialogue étant réduit au strict minimum. Une langue de relation improvisée ou pidgin, que les linguistes appellent lingua franca (langue franque), voit alors le jour. C'est un mélange de termes portugais et africains qui suit la grammaire et la syntaxe africaines (6). Même si nous ne connaissons pas le nombre de mots et d'expressions alors nécessaires aux transactions commerciales, il devait être, de toute évidence, nettement inférieur au nombre de mots indispensables à la discussion de sujets plus profonds ou à la narration de récits. Quelques dizaines de phrases clés devaient suffire pour la plupart des transactions.
Le pidgin utilisé au début le long de la côte africaine a évolué avec le temps pour se transformer en une langue plus structurée connue sous le nom de créole. Le premier pidgin, rudimentaire, a été transmis puis enrichi et développé jusqu'à devenir une véritable langue. Les Portugais appelaient cette nouvelle langue « crioulo », et les autres peuples européens « portugais noir ». Le créole était pour les Africains qui le parlaient une deuxième ou une troisième langue. Ce créole est encore parlé par certains Africains en ce début du XXIe siècle.
Les Portugais, peu enclins à apprendre les langues africaines ni la nouvelle langue qu'était le créole (7), préféraient engager des Africains qui leur servaient d'interprètes. Les autres nations européennes, Hollande, Angleterre, France et autres, préféraient, elles aussi, se servir d'Africains comme intermédiaires dans leurs relations commerciales avec l'Afrique. Ce manque d'intérêt des Européens pour l'apprentissage des langues africaines venait peut-être d'un sentiment de supériorité qu'ils auraient éprouvé, pensant que toute langue incompréhensible pour eux était inférieure aux leurs. Quoi qu'il en soit, le crioulo répandu par les Portugais devint le plus commun de tous les pidgins et créoles qui se développèrent le long de la côte atlantique de l'Afrique (8).
Pour répondre à la demande des Portugais en interprètes africains, il se constitue un groupe de spécialistes fort estimés appelés « grumetes ». Ces spécialistes font de la traduction et participent activement à la démarche commerciale comme telle en facilitant les opérations de troc, voire en effectuant eux-mêmes les échanges. Les grumetes aident également à la navigation le long de la côte occidentale africaine. Un certain nombre de Portugais, de leur plein gré ou après sélection, finissent par s'installer parmi les Africains dans les principaux comptoirs établis le long de la côte. (Quand d'autres Européens atteignent à leur tour la côte occidentale d'Afrique pour établir des comptoirs, il existe déjà environ deux douzaines de comptoirs portugais.) Les Portugais appellent « lançados », qui vient du verbe « se lancer », les Européens qui vivent à terre. Le terme décrit bien la situation des Européens qui se lancent à l'époque dans une aventure comme aucune autre auparavant. Les Africains donnent le droit aux lançados d'épouser des filles de l'endroit, souvent issues des familles des chefs ou d'autres personnalités influentes; c'est une façon de resserrer les liens avec leurs partenaires commerciaux (9).
Le plus important et le plus connu de ces établissements côtiers est Elmina, dont le nom vient de la proximité d'une mine d'or, sur la Côte-de-l'Or, et qui compte entre 15 000 et 20 000 habitants en 1682. Elmina, ville fortifiée, devait devenir le plus infâme des bastions européens et des centres de traite des esclaves le long de la côte occidentale d'Afrique. Au XVIIIe siècle, 30 000 esclaves transitent par Elmina chaque année en route vers les Amériques. Construit par les Portugais, le château d' Elmina passera plus tard aux mains des Hollandais et des Anglais (10).
Revenons aux lançados et à leurs épouses africaines. Leurs enfants sont des Européens africains ou Euro-Africains, qui forment un petit groupe distinct jouissant d'une situation avantageuse, quoique parfois difficile puisqu'ils doivent faire le pont entre deux cultures. Un grand nombre d'interprètes utilisés dans les échanges commerciaux, voire même la majorité, sont issus de ces mariages mixtes. Ils comprennent la langue, les traditions culturelles et le comportement en affaires des deux parties, et sont des intermédiaires tout indiqués dans un contexte commercial ou autre. Il n'est donc pas surprenant qu'ils deviennent indispensables dans les relations entre les deux cultures. Les Euro-Africains, qui n'appartiennent véritablement à aucune des deux cultures, se sentent parfois victimes de discrimination de la part de l'un et de l'autre groupe. Deux historiens spécialistes de l'Afrique, des Africains et des Afro-Américains, George Brooks et Ira Berlin, décrivent ainsi les Euro-Africains :
[Ils] portaient des vêtements européens et des crucifix ... Ils parlaient crioulo, qui, pour beaucoup, était leur langue maternelle. Ils se vantaient d'avoir des noms et des prénoms portugais et affirmaient être blancs. Ils vivaient dans des maisons différentes, de forme rectangulaire, qu'ils meublaient de quelques articles européens.
Les plus habiles ... devenaient influents en élargissant le réseau social et commercial établi au sein de l'élite et des marchands de leur localité et des alentours. (11)
Les gens des enclaves, résidents à long terme et voyageurs, se mélangèrent bientôt tant génétiquement que géographiquement. Des Européens prirent des Africaines pour épouses ou maîtresses, et avant longtemps, les enfants issus de ces unions contribuèrent à peupler les enclaves. Elmina devint un important noyau d'Euro-Africains (la plupart des Luso-Africains), hommes et femmes nés en Afrique, mais qui avaient un parent africain et un parent européen. Leur teint basané, leur habillement et leur comportement européens, leur connaissance des coutumes locales et de plusieurs langues leur donnaient une compréhension des modes de vie africain et européen, mais les empêchaient en même temps d'être totalement acceptés par l'une ou l'autre culture. (12)
Il est fort probable, bien que nous ne le saurons sans doute jamais avec certitude, que le personnage que nous connaissons sous le nom de Mathieu Da Costa soit issu de ce type d'unions et qu'il soit donc de souche euro-africaine, ce qui expliquerait pourquoi certains documents mentionnent qu'il est « naigre », mot à consonance portugaise utilisé pour le décrire, ainsi que sa profession d'interprète facilitant les relations commerciales. Selon son âge, Da Costa pourrait être un descendant de troisième ou de quatrième génération d'un mariage ou d'une union entre un lançado et une Africaine. Nous ne savons toutefois pas où les interprètes des générations intermédiaires ont bien pu voyager et travailler, ni avec qui ils ont fondé des familles. Il est cependant probable que, dans le cas de chaque génération, le ou les interprètes aient réussi, par mariage ou par d'autres moyens, à garder jalousement les « trucs » de leur profession bien particulière au sein de leurs unités familiales, comme si les compétences et les connaissances qui les rendaient si précieux risquaient de nuire à leur gagne-pain en étant trop connues.
Il est aussi possible que Da Costa et ses prédécesseurs n'aient aucun ancêtre portugais ou d'autre origine européenne, et soient africains. Mathieu pourrait être un grumete, ou le descendant d'un grumete, qui offre ses services d'interprète ou d'intermédiaire aux Européens pour faciliter les échanges commerciaux au cours des voyages le long de la côte africaine. Il semble plus difficile cependant, mais pas impossible, pour un Africain que pour un Euro-Africain de se faire engager par la suite lors de voyages aux Amériques. D'après l'auteur Jack Forbes, « les navires portugais étaient connus pour avoir des équipages de races et de nationalités diverses. De Madagascar au Japon, les équipages étaient souvent composés d'Africains ou d'Indiens (d'Asie du Sud) » (13). Le fait qu'« il y avait beaucoup de marchands portugais à Anvers » dans les années 1500 permet de penser que Da Costa (ou un de ses ancêtres) a pu faire le voyage d'Afrique en Europe. Il se peut aussi que les Hollandais, qui, de toute évidence, connaissent Da Costa et son savoirfaire puisqu'ils veulent l'engager de 1607 à 1609, rencontrent l'interprète lors de l'une des nombreuses captures de navires portugais auxquelles ils se livrent après 1590. Selon Forbes, bon nombre des équipages de ces navires sont composés d'hommes de couleur, et certains sont envoyés dans les ports hollandais des Amériques, comme la Nouvelle-Amsterdam (ancien nom de New York) (14). Si, dans le cas de Da Costa, rien ne prouve effectivement cette hypothèse, les circonstances, elles, nous permettent de l'envisager.
Il se peut très bien aussi que Da Costa ne descende pas d'une lignée d'interprètes spécialistes des échanges commerciaux. Il serait possible, quoique très peu probable, que lui-même ou sa famille descendent des 30 à 40 fils et parents du roi Alfonso Ier du Congo envoyés en Europe à la fin des années 1400 pour devenir prêtres (15). Autre possibilité, plus plausible, mais toujours peu probable : Mathieu Da Costa ou ses ancêtres ont voyagé en Europe vers le nord ou vers l'est, et ont traversé l'Atlantique, peut-être comme esclaves, et ils n'appartenaient à aucune lignée d'interprètes et n'avaient aucune expérience de cette profession. Il aurait fallu dans ce cas purement imaginaire que Mathieu ait fait preuve d'un talent tel qu'il lui aurait permis de se sortir de sa situation et de se voir offrir un poste d'interprète rémunéré lors de voyages à l'extrémité nord-est du continent. À notre avis, une telle hypothèse est moins probable que la possibilité qu'il ait possédé une expérience d'interprète spécialiste des échanges commerciaux en Afrique ou qu'il ait été le descendant d'une telle personne.
Quels que soient les antécédents et la généalogie de Mathieu Da Costa, il est certain que les langues parlées le long de la côte occidentale de l'Afrique étaient différentes de celles des populations autochtones qui vivaient sur la côte est de l'Amérique du Nord et du Sud. Comment Da Costa et d'autres comme lui d'origine européenne ou africaine ont-ils appris une ou plusieurs langues parlées dans les Amériques au point que les Français et les Hollandais fassent appel à leurs services à titre d'interprètes au cours de leurs voyages en Amérique du Nord au début des années 1600?
Trois possibilités s'offrent à nous. La première, c'est que Mathieu Da Costa a passé suffisamment de temps dans les Amériques pour apprendre la langue d'une ou de plusieurs populations autochtones vivant de l'autre côté de l'Atlantique. La deuxième, c'est qu'il a fait la connaissance en Europe d'Amérindiens qui lui ont appris leur(s) langue(s) et qu'il a pu ainsi servir d'interprète lorsqu'il a traversé lui-même l'Atlantique. La troisième, c'est que les pidgins et les créoles utilisés en Afrique ont pu aussi servir en Amérique du Nord, avec quelques adaptations. Avant de nous pencher en détail sur ces trois possibilités, il convient d'examiner rapidement les liens qui se tissent entre l'Europe, l'Afrique et les Amériques à la fin du Xve siècle.
Le monde atlantique
C'est le premier voyage de Christophe Colomb dans les Antilles en 1492 qui ouvre une ère nouvelle d'exploration par les Européens, même si ces derniers sont déjà allés en Amérique du Nord en l'an 1000, lorsque des Scandinaves se sont rendus par la mer à L Anse aux Meadows et ailleurs le long de la côte nord-est du continent. (Il est intéressant de savoir que, entre 1482 et 1484, Colomb se trouve à bord d'un navire portugais en route vers la Côte-de-l'Or) (16). Bien que des pêcheurs basques, bretons, portugais et autres aient déjà précédé le célèbre explorateur au large des bancs et des côtes de l'autre côté de la « mer Océane », comme on l'appelle alors, les voyages de Colomb marqueront le début d'une période de changement sans précédent. Toute une série d'événements donneront lieu à un transfert massif de populations d'Europe et d'Afrique vers les Amériques. Ce mouvement démographique, avec son cortège de maladies, aura des effets dévastateurs sur des millions d'Autochtones d'Amérique du Nord et du Sud.
Les Portugais et les Espagnols sont les premiers à se lancer à la découverte de ce que les Européens appellent le Nouveau Monde, et à en exploiter les richesses. Les Hollandais, les Anglais et les Français leur emboîtent le pas en organisant leurs propres voyages d'exploration. Le premier explorateur connu à s'aventurer dans les eaux de ce qui est aujourd'hui l'est du Canada est Jean Cabot (Giovanni Cabota) en 1497. Plus les navires européens traversent l'Atlantique, plus ils apprivoisent l'océan, au point où ce dernier devient bientôt un espace de navigation très fréquenté reliant les quatre continents. Il se forme une sorte de « monde atlantique », qui s'étend de l'Afrique et de l'Europe d'un côté, à l'Amérique du Nord et du Sud de l'autre (17).
Si, d'entrée de jeu, nous présumons que Mathieu Da Costa n'est pas le premier dans sa famille à servir d'interprète aux marchands européens, ce qui semble plausible, mais qu'il est impossible de confirmer, il devient plus facile d'expliquer ses voyages d'Afrique en Amérique du Nord. Il ne faut pas oublier que, en ces débuts des temps modernes, les métiers se transmettent souvent de père en fils et de mère en fille. Il n'y a aucune raison de penser que ce serait différent dans les familles africaines ou euro-africaines où le père exerce la profession d'interprète ou d'intermédiaire entre deux ou plusieurs cultures. Nous pouvons penser que le savoir-faire transmis à un fils qui s'intéresse à ce métier ou qui est doué comprend ce qui suit : connaissances sur les régions et les populations locales, listes de mots, courtes expressions, langage corporel, coutumes, pratiques utiles et trucs destinés à faciliter la négociation ou le marchandage. Il se peut que ces informations soient transmises par écrit dans les familles où les pères et les fils savent lire et écrire, sinon, elles font partie d'une tradition orale. Étant donné que cette profession permet de gagner relativement bien sa vie, ces informations sont jalousement gardées au sein de la cellule familiale. Il se peut même qu'on se marie entre familles d'interprètes afin de réduire la concurrence au sein de la profession.
Il est possible, bien qu'il n'existe aucun document pour le prouver, que, à un moment donné dans les années 1500, le grand-père de Mathieu Da Costa, ou peut-être un oncle ou un frère plus âgé, ait fait partie de voyages transatlantiques organisés par le Portugal ou un autre pays vers une ou plusieurs destinations, car, vers 1550, il s'effectue des centaines de voyages depuis l'Europe en direction du nord-est de l'Amérique du Nord, et des milliers de marins traversent ainsi l'Atlantique. Un relevé datant de 1578 fait état d'une centaine de bateaux espagnols qui pêchent la morue dans les bancs au large des côtes de Terre-Neuve, de 20 à 30 autres bateaux espagnols qui chassent la baleine, de 50 bateaux portugais, de 150 voiliers français et bretons, et de 50 bateaux anglais (18). L'exploitation des abondantes ressources de la mer est la principale activité économique, ce qui n'empêche pas les contacts occasionnels à terre avec les Autochtones, surtout dans le cadre d'échanges de marchandises européennes contre des fourrures. Les Mi'kmaq qui accueillent Jacques Cartier en brandissant des fourrures lorsque son navire longe les côtes de la Gaspésie en 1534 montre qu'il est déjà bien connu à l'époque que les Européens veulent des pelleteries et qu'ils sont prêts à échanger des produits manufacturés pour en obtenir.
D'une façon générale, les Européens entreprennent dans les années 1500 un plus grand nombre de voyages pour pêcher la morue, chasser la baleine ou faire du troc avec les Amérindiens que pour tenter de fonder des colonies permanentes. Une de ces tentatives de colonisation le long de la côte atlantique, qui est de courte durée, est justement une entreprise portugaise. Joao Alvares de Fagundes établit, ou du moins tente d'établir, une colonie dans l'île du Cap-Breton en 1521 (19). Une telle entreprise, surtout de la part des Portugais, aurait pu très bien créer des débouchés pour un interprète, disons pour un parent de Da Costa, et lui permettre d'acquérir de l'expérience auprès des Mi _kmaq. Il n'y a rien, en effet, qui empêche un interprète euro-africain de traverser l'Atlantique sur un navire français, hollandais, espagnol, basque ou anglais. Comme les athlètes professionnels sans contrat d'aujourd'hui, les capitaines de navire, les pilotes, les navigateurs et les membres d'équipage d'expérience naviguent souvent à cette époque sous des pavillons différents, et les interprètes en font certainement autant.
Il n'est pas non plus nécessaire de traverser l'Atlantique pour rencontrer des Amérindiens et se familiariser avec des éléments de leur(s) langue(s), puisque des centaines d'Autochtones sont faits prisonniers dans les années 1500 et envoyés en Europe; un petit nombre seulement traversent l'Atlantique de leur plein gré. Da Costa, ou un de ses parents, aurait très bien pu ainsi commencer à apprendre, sur le continent européen, des mots et des phrases clés qui se seraient avérés utiles par la suite dans les relations commerciales.
Les interprètes et la langue du commerce en Amérique du Nord
Tout comme en Afrique, les explorateurs et les marchands européens ont besoin des services d'interprètes en Amérique du Nord et du Sud pour mener des négociations parfois délicates avec les populations indigènes. En d'autres mots, les Européens sont toujours peu enclins à apprendre les langues des peuples autochtones avec lesquels ils font ou espèrent faire du commerce, et préfèrent s'en remettre à des spécialistes, exception faite peut-être des Basques. Si la suggestion de Ralph Pastore est juste, « il se pourrait que les pêcheurs et commerçants de fourrures basques aient eu l'habitude de laisser des jeunes hommes passer l'hiver parmi les Autochtones pour qu'ils apprennent leur langue et qu'ils puissent servir d'interprètes » (20).
Nous ne savons pas, et il n'y a sans doute pas moyen de le savoir, si les navires qui font le voyage d'Europe aux Amériques ont l'habitude d'avoir à bord un interprète d'origine africaine, euro-africaine ou autre. Il est cependant certain que, dans les années 1500 du moins, les Européens essaient de régler le problème de la communication avec les populations autochtones en ramenant avec eux des Amérindiens pour leur apprendre leurs langues respectives. C'est ainsi que des centaines d'Amérindiens, souvent victimes d'enlèvement, sont envoyés en Europe au cours des premières décennies de la découverte du Nouveau Monde. La plupart sont ramenés comme curiosités; certains sont asservis et d'autres, comme le fils d'un chef iroquois du Saint-Laurent pris par Jacques Cartier, viennent spécialement pour apprendre le français. Il est rare que les voyages vers l'Europe soient entrepris de bon gré, pourtant il y en a, comme dans le cas du chef mikmaq Messamouet, qui ira à Bayonne avant 1580 pour y perfectionner son français (21).
Nous pouvons nous demander, sachant que Da Costa et d'autres seront engagés par la suite en qualité d'interprètes, si les Européens n'ont pas commencé à avoir des doutes quant à certains interprètes amérindiens et à se demander de quel côté ils se rangent, du moins dans leurs négociations avec leurs propres peuples. Si c'est le cas, les marchands voudront des interprètes dont ils sauront qu'ils travaillent uniquement pour eux. Ce raisonnement, parfaitement logique, est peut-être une des raisons pour lesquelles tant les Français que les Hollandais font appel à Mathieu Da Costa au début des années 1600.
Il est très tentant de fabuler pour essayer de percer le mystère de Mathieu Da Costa, comme le prouvent le nombre d'auteurs qui l'ont fait par le passé et les diverses hypothèses avancées dans le présent document. C'est d'autant plus tentant que nous connaissons l'issue : un Noir est engagé à titre d'interprète pour traiter avec les Amérindiens, et pourtant nous ne possédons pas l'information qui nous permettrait de comprendre comment il a pu acquérir ce savoir-faire. Une explication peut sembler meilleure qu'une autre, mais il ne faut pas oublier que la vie des gens n'est pas toujours conforme à la logique que les circonstances permettent d'entrevoir.
Toute supposition mise à part, nous avons une certitude : au moins deux Noirs connus sont engagés par les Européens pour travailler en qualité d'interprètes dans le nord-est de l'Amérique du Nord au début des années 1600. Il s'agit de Mathieu Da Costa, qui signe un contrat en Europe en 1608 pour commencer à travailler en 1609 en tant qu'interprète outre-mer pour le compte de Pierre Dugua de Mons, et de Jan Rodriguez, dont le nom est mentionné dans des documents de 1613-1614 (22), et qui est interprète dans la colonie hollandaise établie le long de l'Hudson, dans ce qui est aujourd'hui l'état de New York. Rodriguez est décrit comme étant « espagnol », ou « mulâtre », ou encore « noir ». Nous pouvons penser que les Français et les Hollandais n'auraient pas engagé ces deux interprètes noirs s'ils n'avaient pas eu les compétences requises pour faciliter les négociations commerciales ou les échanges avec les Amérindiens. D'une façon ou d'une autre, Da Costa et Rodriguez ont acquis quelque part un niveau de connaissance suffisant de la nature du commerce avec les Amérindiens et de la langue utilisée pour pouvoir vendre leurs services aux organisateurs d'entreprises de colonisation. Il semble que Rodriguez soit originaire de Saint-Domingue, dans les Antilles (23).
Il se peut que d'autres Africains ou Euro-Africains aient été engagés pour servir d'intermédiaires entre les Européens et les Amérindiens à la fin des années 1500 et au début des années 1600, mais, jusqu' à présent, nous n'en avons aucune preuve. Le Noir mort à bord du Jonas en route vers Port-Royal en 1606 (24), et dont parle Marc Lescarbot, pourrait être un de ces interprètes. Comme il n'est fait mention nulle part de sa profession, il aurait pu s'agir aussi bien d'un marin, que d'un domestique ou d'un esclave. Nous ne connaîtrons jamais sa véritable identité ni son rôle exact, à moins de trouver de nouvelles sources d'information.
Soit dit en passant, les Européens vont faire appel à des personnes de souche africaine pour servir d'interprètes et d'intermédiaires entre différentes cultures pendant une bonne partie du XVIIIe siècle. Les capitaines négriers et les marchands d'esclaves comptent sur les interprètes pour étendre leur commerce dans les Amériques, comme ils l'ont fait en Afrique. C'est ainsi qu'une annonce parue dans un journal de la Jamaïque en 1790 demande de l'information au public sur un esclave en fuite qui parle « anglais, français, hollandais, danois et portugais » (25).
Revenons au XVIIe siècle. Notre intérêt pour Da Costa (et Rodriguez) est d'autant plus piqué que nous découvrons que les langues qui servent aux échanges avec les Amérindiens le long de la côte du nord-est de l'Amérique du Nord ne sont pas des langues autochtones pures, mais, comme en Afrique, des pidgins qui se sont développés peu après les premiers contacts avec les Européens. Ces langues simplifiées réservées à l'usage commercial combinent des éléments linguistiques autochtones et européens (26). Dans la région connue sous le nom de Canada atlantique, nous constatons ce phénomène dès le début des années 1540, voire même plus tôt. Ce sont évidemment les mots et les expressions, légèrement modifiés, des langues européennes portant sur les articles échangés qui sont d'abord utilisés dans les pidgins, comme les mots désignant les vêtements. Les langues parlées par les Mi kmaq, les Malécites et autres peuples autochtones dans les années 1500 contiennent toutes des termes empruntés au portugais, à l'espagnol, au français, au basque et à l'anglais.
Quel que soit le premier pidgin, probablement le pidgin portugais, c'est une langue inspirée du basque qui devient la plus courante des langues à usage commercial. De nombreux Européens font d'ailleurs mention de l'existence de ce ou ces pidgins dans des documents des années 1500 et du début des années 1600. Marc Lescarbot, avocat parisien établi à Port-Royal, mais qui voyage beaucoup dans la région, mentionne à plusieurs reprises les langues qu'il y entend parler ou qui y sont utilisées. Il dit même, dans un passage, que les Basques fréquentent depuis si longtemps les peuples autochtones de la région de l'Atlantique que la langue parlée par les tribus de la côte est à moitié basque. Lescarbot exagère et corrigera la situation en précisant ailleurs que les Amérindiens parlent toujours leur propre langue entre eux, mais que, pour des raisons de commodité, ils parlent aux Européens dans une langue que ces derniers connaissent mieux et dans laquelle se mêle beaucoup de basque (27). Bien d'autres observateurs européens constatent la même chose (28). L'un d'eux, qui raconte l'histoire de la colonie écossaise établie à Port-Royal en 1629, écrit que la langue du peuple autochtone de la région est « déparée par le basque » (29).
Nous trouvons l'explication suivante donnée en 1710 de l'influence des Basques sur les langues parlées par les peuples autochtones de la côte est :
Lorsque les Basques ont commencé à pêcher la morue et à chasser la baleine dans le golfe du Saint-Laurent, ils se sont liés d'amitié avec les Indiens de la région et ont fait du commerce avec eux ... Comme leurs langues étaient complètement différentes, ils ont développé une sorte de lingua franca composée de basque et de deux différentes langues autochtones grâce à laquelle ils pouvaient relativement bien se comprendre; cette langue était déjà parlée depuis longtemps à l'arrivée des colons des établissements français du Canada et du nord de l'Acadie. (30)
D'après Peter Bakker, spécialiste des langues, c'était surtout les Mi kmaq et les Montagnais, installés le long de la rive nord du Saint-Laurent, qui utilisaient le pidgin basque. Il semble que les autres peuples côtiers, comme les Malécites et les Passamaquoddy, aient adopté une langue de relation moins influencée par le basque; Bakker ne peut émettre un avis quant aux Inuits et aux Béothuks, faute de preuves suffisantes. Contrairement à ceux d'Afrique, les pidgins utilisés le long des côtes du Canada atlantique ne se sont pas développés pour former un créole qui a réussi à survivre jusqu'à aujourd'hui.
En rapprochant ce que nous savons sur les langues parlées dans le nord-est de l'Amérique du Nord et la possibilité que Da Costa, Rodriguez et peut-être d'autres soient des interprètes euroafricains ou africains de deuxième ou de troisième génération, nous arrivons à expliquer de façon plausible comment et pourquoi ces Noirs ont été engagés lors des voyages entrepris vers le nordest de l'Amérique du Nord à des fins de commerce et de colonisation dans les années 1500 et au début des années 1600. Selon cette interprétation, Da Costa et les autres comme lui possédaient une connaissance et une expérience des pidgins qui leur permettaient de faire du commerce pour le compte des Européens dans l'ensemble du monde atlantique. Il est certain que le créole à base de portugais parlé le long de la côte africaine était différent des pidgins influencés par le basque et le portugais et utilisés le long des côtes du Canada atlantique. S'il devait inévitablement y avoir des similarités de vocabulaire, la palette de phrases nécessaires aux négociations commerciales dans un pidgin ne devait certainement pas permettre de maîtriser l'une ou l'autre langue dont il était issu. Pourtant l'historienne Ira Berlin écrit qu'« une connaissance pratique de la langue créole [africaine] « était « un avantage tout aussi précieux le long de la côte de l'Amérique du Nord que de l'Afrique » (31). Ceci dit, il a fallu, de toute évidence, faire des adaptations et incorporer le vocabulaire et la syntaxe dont se servaient les Mi _kmaq, les Montagnais et les autres peuples autochtones, pour pouvoir communiquer avec les Amérindiens et les comprendre. Il aura sans doute été beaucoup plus facile à des interprètes habitués à voyager d'apporter ces modifications qu'à des Européens ordinaires. Autrement, pourquoi engager des interprètes?
Il se peut également que Da Costa et Rodriguez ne furent pas engagés que pour leurs compétences en traduction. Il est fort probable que ces hommes, comme leurs prédécesseurs d'Afrique, ne connaissaient pas seulement les phrases clés de la langue du commerce, mais également le langage corporel et les coutumes associés aux relations commerciales. Il est tout à fait logique de présumer que les Hollandais et les Français ne les ont pas engagés que pour leurs compétences linguistiques. Ils se procuraient également, ou du moins espéraient se procurer, les services de deux interprètes connus pour leur aptitude à négocier de façon plus avantageuse qu'il n'aurait autrement été possible. Qui plus est, les rencontres entre Européens et Amérindiens étaient souvent loin d'être amicales; des conflits, parfois violents, pouvaient survenir et se solder par des morts des deux côtés (32). On cherchait donc des interprètres capables de contribuer à l'établissement et à l'entretien de relations à la fois pacifiques et profitables.
Mathieu Da Costa : ce que nous révèlent les documents écrits
Il est possible de déterminer un certain nombre de faits en puisant dans les documents européens datant de 1607 à 1619 (33). Tout d'abord, le nom de Mathieu Da Costa apparaît pour la première fois en février 1607, alors que notre homme se trouve en Hollande. À cette époque, Jean Ralluau, secrétaire de Pierre Dugua de Mons, se rend à Amsterdam pour protester contre la saisie, une année auparavant, des navires marchands de Dugua par les Hollandais à Tadoussac. (34) Une des causes du litige est le détournement ou l'enlèvement de Mathieu Da Costa par les Hollandais. Nous pouvons donc penser, même s'il n'en est fait mention nulle part, que Da Costa travaille comme interprète, ou qu'il a été engagé à ce titre, au moment de l'intervention des Hollandais. Nous pouvons aussi en conclure, mais sans pouvoir le prouver, que Da Costa prend part aux activités commerciales de Dugua le long du Saint-Laurent. L'année suivante, soit en 1608, Da Costa signe un contrat à Amsterdam aux termes duquel il doit naviguer avec Dugua de Mons, ou pour le compte de ce dernier, en qualité d'interprète « pour les voyages de Canada, Cadie et ailleurs » (35). Le fait que le mot « voyages » soit au pluriel dans les documents en question est important, tout comme, peut-être, le fait que le Canada soit mentionné avant l'Acadia (« Cadie »). On espère donc, de toute évidence, mettre les talents de Da Costa à profit au cours des voyages commerciaux dans la région de l'Atlantique, et certainement le long du Saint-Laurent (ce que l'on veut dire par Canada). Le contrat passé entre Da Costa et Dugua doit prendre effet en janvier 1609 et durer trois ans. Le traitement annuel est de 60 couronnes, soit environ 195 livres, ce qui est une somme importante à l'époque. Malheureusement pour le sieur de Mons, le monopole qui lui a été accordé en 1603 est révoqué à la fin de 1608. Cela n'empêchera pas le marchand protestant français de « continuer à participer activement au commerce canadien et à encourager l'exploration et la colonisation du pays jusqu'en 1617 » (36). Il se peut que Da Costa participe à certains de ces voyages, mais pas au cours des premiers mois d'exécution du contrat, puisque, au printemps de 1609, il n'est pas à bord d'un navire en route vers l'Amérique du Nord, mais à Rouen. Nous savons qu'il est ensuite emprisonné au Havre en décembre 1609 pour « insolences ». Nous ne savons pas ce qui s'est passé, mais le mot « insolences » nous permet de penser que Da Costa avait un caractère indépendant et qu'il avait son franc-parler.
D'après ce que nous savons, le nom de Da Costa n'est plus mentionné par la suite que dans une série de procès au sujet de coûts assumés par les Français pour reprendre l'interprète aux Hollandais, et, plus tard, de frais destinés à sa subsistance. Les parties au litige sont Pierre Dugua, d'un côté, et, de l'autre, Nicolas de Bauquemare, marchand de Rouen qui, à différents moments, a travaillé pour le compte de Dugua et de ses rivaux les Hollandais. L'affaire traînera pendant plus de dix ans, ce qui ne veut pas dire que Da Costa est en prison pendant tout ce temps, ni qu'il lui est interdit de naviguer pour le compte de quiconque. Il n'est mentionné nulle part dans les documents relatifs aux procès que Da Costa a travaillé pour Dugua de Mons ou toute autre personne, ni qu'il a disparu sans laisser de trace, ni qu'il est mort. Comme ces procès visaient à obtenir réparation pour des dépenses ou des pertes subies, le sort de Da Costa n'y était pas une préoccupation.
Mathieu Da Costa : conclusion
Nous avons beaucoup spéculé dans le présent document sur la vie de Mathieu Da Costa, et notamment sur ses origines possiblement euro-africaines et le fait que sa famille ait pu être liée depuis plusieurs générations aux entreprises commerciales des Européens. Nous tenons à préciser cependant combien cette hypothèse demeure incertaine. Il n'est indiqué nulle part où et quand est né Da Costa, qui sont ses parents, s'il s'est jamais marié, s'il a eu des enfants, de quoi il a l'air, ni où et quand il est mort. Il n'est également fait aucune mention de où et quand il est peut-être venu en Amérique du Nord, combien de temps il y est resté, pour le compte de qui il a tavaillé ni auprès de qui il a pu servir d'interprète. D'autres études pourront peut-être nous aider à répondre à quelques-unes de ces questions, mais, pour l'heure, nous ne pouvons que nous demander si Mathieu Da Costa était bien le descendant d'une union entre un Portugais et une Africaine, ou d'un navigateur africain qui a travaillé à bord de navires européens qui parcouraient le monde atlantique, d'abord comme marin, et par la suite, en raison de son talent pour les langues, comme interprète. Ce ne sont ni les permutations ni les combinasions qui manquent!
Bien que nous n'ayons pas de précisions sur sa famille ni sur ses antécédents professionnels, nous savons que Da Costa avait la peau plus foncée que les Européens pour qui il travaillait, car on le décrit comme étant « naigre ». Pour ce qui est de ces compétences d'interprète dans les relations commerciales avec les Amérindiens, il devait certainement avoir déjà fait ses preuves lors de voyages antérieurs avec les Français et/ou les Hollandais avant 1607-1608, ou s'être taillé une réputation qui justifiait qu'on ait recours à ses services. Cela voudrait dire que la carrière d'interprète de Da Costa n'a pas débuté en 1607-1608, puisque, pour assumer son ou ses rôles, il aurait dû avoir une bonne compréhension du français, du hollandais, du pidgin basque, du pidgin portugais et peut-être d'autres langues dans lesquelles se menaient à l'époque les négociations commerciales ou autres discussions entre Amérindiens et Européens.
Il est également impossible de savoir avec précision, du moins pour le moment, où Mathieu Da Costa a pu voyager avant ou après les documents datant de 1607-1609. Il s'est effectué d'innombrables voyages de commerce et d'exploration dans le nord-est de l'Amérique du Nord, depuis New York jusqu'à Terre-Neuve et le long du Saint-Laurent, pendant toute la fin des années 1500 et au début des années 1600. Da Costa aurait très bien pu participer à quelques-uns comme à beaucoup de ces voyages. Les endroits où il aurait pu se rendre sont certainement les côtes et les ports connus comme étant des lieux de rencontre entre les Européens et les Amérindiens, par exemple Canso, la baie de Fundy et le long du Saint-Laurent. Il aurait très bien pu être déjà allé, au début des années 1600, dans de nombreux endroits au service de divers capitaines et marchands commanditaires. S'il avait déjà navigué avec Pierre Dugua de Mons avant de signer le contract à Amsterdam en 1608, les deux hommes auraient pu se rencontrer au poste de traite de Tadoussac établi sur le Saint-Laurent. Le sieur de Mons y était en 1600, puis plus tard. Da Costa aurait pu, par la suite, s'arrêter à Port-Royal, mais pas en 1607-1608, puisqu'il était en Europe.
D'un autre côté, si Da Costa naviguait avec les Hollandais à la fin des années 1500 et au début des années 1600, il aurait très bien pu se rendre dans des endroits autres que ceux où allaient les Français. Il travaillait peut-être pour les Hollandais quand le Witte Leeuw (Lion blanc), navire marchand particulièrement bien armé, s'empara des navires du sieur de Mons sur le Saint-Laurent en 1607. Si Da Costa a participé à des entreprises hollandaises après le début des procès en 1609, il aurait pu se rendre jusqu'à la Nouvelle-Amsterdam en remontant l'Hudson, ou à Curaçao dans les Antilles.
L'histoire de Mathieu Da Costa n'est que celle d'un seul homme, dont nous ne connaissons pas grand chose avec certitude. L'histoire de cet interprète noir revêt cependant une grande importance, car elle nous laisse entrevoir les liens fascinants qui se sont tissés entre les peuples d'Afrique, d'Europe et des Amériques à l'époque de grand dévelopement qui a marqué la fin du XVIe et le début du XVIIe siècle. Nous espérons pouvoir trouver d'autres sources d'information qui nous aideront à mieux comprendre la vie non seulement de Mathieu Da Costa, mais aussi des autres hommes et des femmes de race noire qui vivaient à son époque.
Lectures suggérées
L'auteur du présent document a puisé dans de nombreuses sources d'information livres et articles qui sont listées ci-dessous à l'intention de ceux et de celles qui aimeraient approfondir le sujet.
Usage d'interprètes par les Européens en Afrique
Ira Berlin, « From Creole to African: Atlantic Creoles and the Origins of African-American Society in Mainland North America », in William and Mary Quarterly, 3e séries, vol. LIII, N 2, (avril 1996) p. 251-288.
George E. Brooks, Landlords and Strangers: Ecology, Society, and trade in Western Africa, 1000-1630, Boulder, Westview Press, 1993.
Anne Hilton, The Kingdom of Kongo, New York, Oxford University Press, 1985.
Wyatt MacGaffey, « Dialogues of the Deaf: Europeans on the Atlantic coast of Africa », p. 249-267, in Stuart B. Schwartz, dir., Implicit Understandings: Observing, Reporting, and Reflecting on the Encounters Between Europeans and Other Peoples in the Early Modern Era, New York, Cambridge University Press, 1994.
John Thornton, Africa and Africans in the Making of the Atlantic World, 1400-1800, New York, Cambridge University Press, 1998 [1992].
Walvin, James, Making the Black Atlantic, Britain and the African Diaspora London, Cassell, 2000.
Les pidgins et les créoles
Jacques Arends, Pieter Muysken and Norval Smith, dir., Pidgins and Creoles, An Introduction, Amersterdam & Philadelphie, John Benjamins Pub. Co., 1994.
Peter Bakker, « The language of the coast tribes is Half Basque. A Basque-Amerindian Pidgin in use between Europeans and Native Americans in North America, ca. 1640 », Antropological Linguistics, 31 (1989), 3-4, p. 117-47.
Peter Bakker, « Two Basque loanwords in Micmac », International Journal of American Linguistics, 55 (1988), 258-261.
Peter Bakker, « Basque Pidgin Vocabulary in European-Algonquian Trade Contacts », in W. Cowan, dir., Papers of the Nineteenth Algonquian Conference, Ottawa, Carleton University, 1988, p. 7-15.
Bill Hymes, dir., Pidginization and Creolization of Languages: Proceedings of a Conference Held at the University of the West Indies, Mona, Jamaica, April 1968, Londres, Cambridge University Press, 1971.
Mathieu Da Costa et Jan Rodriguez
Peter Bakker, « First African into New Netherland, 1613-1614 », De Halve Maen, vol. 68, 3
Ch. De Beaurepaire, « Notes sur Pierre Du Gua, lieutenant général au Canada sous Henri IV », La Normandie (juillet 1893), p. 2-12 (automne 1995), p.v50-53.
Th. J. Kupp, « Quelques aspects de la dissolution de la compagnie de M. de Monts, 1607 », Revue de l'histoire de l'amérique française, Vol. 24, no 3 (décembre 1970), p. 357-374.
Robert Le Blant et René Beaudry, dir., Nouveaux documents sur Champlain et son époque. vol. 1 (1560-1622) (Ottawa, 1967), plus particulièrement les documents 105, 106, 110, 114, 117, 168 et 212 (p. 226)
Marc Lescarbot, «Nova Francia, A Description of Acadia, 1606», Londres, George Routledge & Sons, 1928.
George MacBeath, « Du Gua de Monts, Pierre », Dictionary of Canadian Biography, Toronto, University of Toronto Press, 1966, p. 291-294.
Hilary Russell, « Looking for Mathieu da Costa », manuscrit archivé, Parcs Canada, Halifax.
Barbara Schmeisser, « Chronology of events surrounding Mathieu Da Costa », manuscrit archivé, Parcs Canada, Halifax.
Langage des distinctions raciales
Jack D. Forbes, Africans and Native Americans: The Language of race and the Evolution of Red-Black Peoples, Urbana & Chicago, University of Illinois Press, 1993.
Notes complémentaires
1. L'auteur désire remercier les personnes qui ont contribué, par leur assistance et leurs conseils, à la préparation du présent document. Tout d'abord Hilary Russell et Barbara Schmeisser, dont les recherches sur Mathieu Da Costa ont été une source très précieuse, ainsi que David States et Ruth Whitehead, dont les suggestions ont facilité l'étude du sujet.
2. Hilary Russell résume l'évolution des documents publiés mentionnant Da Costa dans son manuscrit inédit intitulé Looking for Math. da Costa, et archivé à Parcs Canada, à Halifax. Le nom de Math. Da Costa est mentionné pour la première fois en 1939 dans un document publié intitulé Pierre du Gun, Sieur de Monts, Records: Colonial and Saintongeois (Londres, Bernard Quaritch, 1939), p. 51, note 1, de William Ingles Morse. Les ouvrages plus récents dans lesquels le nom de Da Costa est mentionné sont les suivants : Champlain, The Life of Fortitude de Morris Bishop (Toronto, McLelland & Stewart, 1963), p. 98; Canada and Its People of African Descent de Leo W. Bertley (Pierrefonds, Bilongo Publishers, 1977), p. xi; Gentlemen and Jesuits de Elizabeth Jones (Toronto, University of Toronto Press, 1986), pp. 260-261; Peoples of the Maritimes: Blacks de Bridglal Pachai (Tantallon, Four East Pub, 1987), p. 7. Le personnage de Da Costa a également été traité dans plusieurs films et figure dans au moins deux sites Web. On dit souvent de Da Costa qu'il faisait partie du groupe de Pierre Dugua de Mons qui a fondé l'établissement de Port-Royal.
3. George MacBeath, dans sa biographie du Dictionary of Canadian Biography, volume 1, p. 291-294, appelle le personnage Du Gua de Monts. Plus récemment, des spécialistes, et notamment Jean Liebel dans un mémoire entrepris en France, identifie l'homme comme étant Dugua de Mons. C'est d'ailleurs selon cette graphie que le sieur de Mons signait son propre nom et que Samuel Champlain l'écrivait également.
4. Nous ne sommes même pas certains du nom exact de l'homme, car sa graphie diffère dans les documents historiques selon la langue de la personne qui le mentionne. Dans les documents français, il est appelé « Mathieu De Coste », et dans les documents hollandais « Matheus de Cost », « een Swart genamd Matheu » et autres variantes. La plupart des documents qui nous intéressent ont été publiés dans les Nouveaux documents sur Champlain et son époque, vol. 1 (1560-1622), (Ottawa, 1967), sous la direction de Robert Le Blant et de René Beaudry. Il s'agit plus particulièrement des documents 105, 106, 110, 114, 117, 168 et 212 (p. 226). Les documents hollandais sont cités par Hilary Russell dans le rapport intitulé Documents from Gemeentearchief Amsterdam, qu'elle a rédigé en octobre 1998 à la suite de recherches effectuées en Hollande. Ce manuscrit est archivé dans les bureaux de Parcs Canada à Ottawa et à Halifax.
5. Article de Wyatt MacGaffey intitulé « Dialogues of the Deaf: Europeans on the Atlantic coast of Africa », et publié dans Implicit Understandings: Observing, Reporting, and Reflecting on the Encounters Between Europeans and Other Peoples in the Early Modern Era, sous la direction de Stuart B. Schwartz (New York, Cambridge University Press, 1994), p. 249-267.
6. Pour se familiariser avec les pidgins et les créoles, se reporter aux ouvrages intitulés Pidgins and Creoles, An Introduction, publié sous la direction de Jacques Arends, de Pieter Muysken et de Norval Smith (Amsterdam & Philadelphie, John Benjamins Pub. Co., 1994), et Pidginization and Creolization of Languages: Proceedings of a Conference Held at the University of the West
Indies, Mona, Jamaica, April 1968, publié sous la direction de Bill Hymes (Londres, Cambridge University Press, 1971).
7. Le mot « créole » peut s'utiliser dans au moins trois contextes différents, mais toujours liés à la création de quelque chose de nouveau à la suite d'un mélange d'éléments auparavant distincts. Le mot lui-même vient du latin criar, qui veut dire créer. Dans les travaux érudits consacrés à la « créolisation », le mot s'applique aux langues et aux personnes. Le présent document traite du premier concept, tandis que l'autre concept peut avoir deux significations. En effet, à l'origine, le mot créole désignait une personne de race blanche née dans les colonies, puis il est devenu, en anglais, synonyme de métis ou mulâtres. La Historical Archaeology, volume 34, no 3 (2000) contient divers articles sur les créoles et la créolisation dans un contexte archéologique.
8. John Thornton résume l'évolution des pidgins devenus des créoles en Afrique occidentale dans Africa and Africans in the Making of the Atlantic World, 1400-1800 (New York, Cambridge University Press, 1998 [1992]), p. 211-216.
9. George E. Brooks explique ce que sont les grumetes et les lançados dans l'article intitulé Landlords and Strangers: Ecology, Society, and Trade in Western Africa, 1000-1630 (Boulder, Westview Press, 1993), p. 124, pp.136-37.
10. La ville d'Elmina est classée site du patrimoine mondial; son histoire est racontée dans de nombreux ouvrages consacrés à l'Afrique et au commerce des esclaves. Plusieurs sites Web donnent également un résumé de son histoire et montrent des photos des bâtiments de la ville qui ont survécu.
11. Brooks, Landlords and Strangers, p. 194, p. 195-96.
12. Article d'Ira Berlin intitulé « From Creole to African: Atlantic Creoles and the Origins of African-American Society in Mainland North America », publié dans William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 53, no 2, avril 1996, p. 257.
13. Jack D. Forbes, Africans and Native Americans: The Language of race and the Evolution of Red-Black Peoples (Urbana & Chicago, University of Illinois Press, 1993), p. 38.
14. Forbes, Africans and Native Americans, p. 48-49.
15. Anne Hilton, The Kingdom of Kongo (New York, Oxford University Press, 1985), p. 64.
16. MacGaffey, « Dialogues of the Deaf », p. 252.
17. Beaucoup a déjà été écrit sur le monde atlantique et le nombre d'ouvrages sur le sujet ne fait qu'augmenter. Les livres et les articles mentionnés dans l'article d'Ira Berlin intitulé from Creole to African sont un excellent point de départ. L'Université de New York a élaboré un atelier consacré au monde atlantique. Pour en savoir plus, consulter le site Web à l'adresse suivante : www.nyu.edu/pages/atlantic/.
18. Richard Brown, A History of the Island of Cape Breton (Belleville, Mika Publishing Co., 1979), [1869], p. 34.
19. Rien dans l'article de David B. Quinn intitulé « North America from Earliest Discovery to First Settlements », publié dans The Norse Voyages to 1612 (New York, Harper & Row, 1975), p. 352, ni dans celui de Carl Ortwin Sauer intitulé Sixteenth Century North America, The Land and the People as Seen by the Europeans (Berkeley, University of California Press, 1971), pp. 49-51, ne permet de conclure que c'était bien dans l'île du Cap-Breton que se trouvait la colonie de Fagundes. Champlain écrit cependant au sujet de Niganis (Ingonish) que les Portugais ont essayé d'occuper cette île et qu'ils y ont passé un hiver, mais que les rigueurs du climat et le froid les ont forcés à abandonner leurs habitations. Champlain est cité dans Historical and Descriptive Account of the Island of Cape Breton and of its Memorials of the French Regime (Montréal, 1892), p. 138, de J.G. Bourinot.
20. Article de Ralph Pastore intitulé « The Sixteenth Century: Aboriginal Peoples and European Contact », publié dans The Atlantic Region to Confederation: A History (Toronto, University of Toronto Press, 1994), p . 29., sous la direction de Phillip A. Buckner et de John G. Reid.
21. Article de Peter Bakker intitulé « The language of the coast tribes is Half Basque. A Basque-Amerindian Pidgin in use between Europeans and Native Americans in North America, ca. 1640 », publié dans Anthropological Linguistics, 31 (1989), 3-4, p. 120.
22. Article de Peter Bakker intitulé « First African into New Netherland, 1613-1614 », publié dans De Halve Maen, volume 68, no 3. L'article, consacré à Rodriguez, parle également longuement de Da Costa.
23. Simon Hart, The Prehistory of the New Netherland Company (Amsterdam : City of Amsterdam Press, 1959), p. 23, p. 75.
24. Marc Lescarbot, Nova Francia, A Description of Acadia, 1606 (Londres, George Routledge & Sons, 1928).
25. Tiré d'une annonce dont parle James Walvin dans Making the Black Atlantic, Britain and the African Diaspora (Londres, Cassell, 2000), p. 71. On trouvera aux pages 70 et 71 une explication de l'usage d'interprètes africains dans le commerce des esclaves.
26. L'auteur s'est fondé pour cette partie du document sur les trois articles suivants de Peter Bakker : « The language of the coast tribes is Half Basque. A Basque-Amerindian Pidgin ... ca. 1640 », et « Two Basque loanwords in Micmac », publiés dans l'International Journal of American Linguistics, 55 (1988), pp. 258-261, et « Basque Pidgin Vocabulary in European-Algonquian Trade Contacts », publié dans Papers of the Nineteenth Algonquian Conference (Ottawa, Carleton University, 1988), p. 7-15, sous la direction de W. Cowan.
27. Ces deux citations de Lescarbot se trouvent dans l'article de Bakker intitulé « The language of the coast tribes is Half Basque », p. 124, p. 121.
28. Ruth Whitehead écrit que « les Mi'kmaq et les Malécites parlaient couramment à cette époque [vers 1580] le pidgin basque, qui était la langue utilisée à des fins commerciales dans le golfe du Saint-Laurent », dans « I Have Lived Here Since the World Began, Atlantic Coast Artistic Traditions », publié dans The Spirit Sings, Artistic Traditions of Canada's First Peoples (Toronto, McClelland & Stewart / Glenbow Museum, 1987), p. 34.
29. Article de Naomi Griffiths et de John G. Reid intitulé « New Evidence on New Scotland », publié dans William and Mary Quarterly, 3e série, volume 49 (juillet 1992), pp. 492-508.7
30. Bakker, « Two Basque Loanwords », p. 259
31. Berlin, « From Creole to African », p. 266.
32. Pastore donne plusieurs exemples dans « Sixteenth Century: Aboriginal Peoples and European Contact », p. 33-34.
33. Barb Schmeisser a fait un résumé fort utile de son manuscrit inédit intitulé Chronology of events surrounding Mathieu Da Costa, archivé à Parcs Canada, à Halifax. Pour avoir la transcription des documents hollandais connus, se reporter au rapport inédit de Hilary Russell intitulé Documents from Gemeentearchief Amsterdam. Pour les documents français, voir les Nouveaux documents sur Champlain et son époque, sous la direction de Robert Le Blant et de René Beaudry, Vol. 1 (1560-1622), (Ottawa, 1967), plus particulièrement les documents 105, 106, 110, 114, 117, 168 et 212 (p. 226). Il est conseillé de lire également l'article de Theodore J. Kupp intitulé « Quelques aspects de la dissolution de la compagnie de M. de Monts, 1607 », publié dans la Revue de l'histoire de l'amérique française, vol. 24, no 3 (décembre 1970), p. 357- 374.
34. Les incidents de 1607 sont expliqués dans Kupp : Quelques aspects de la dissolution de la compagnie de M. de Monts, 1607 et dans Hart : The Prehistory of the New Netherland Company, p. 13-15.
35. Se reporter aux Nouveaux documents sur Champlain, document 105, publié sous la direction de Le Blant et de Beaudry.
36. MacBeath, « Du Gua de Monts » dans le Dictionary of Canadian Biography, vol. 1, p. 294.
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