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Motion M-241 : M. Keith Martin (Esquimalt--Juan de Fuca, Alliance canadienne)
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37e Législature, 1ère Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 117
Le jeudi 22 novembre 2001
LES ACADIENS
M. Keith Martin (Esquimalt--Juan de Fuca, Alliance canadienne): Monsieur le Président, premièrement, je veux féliciter mon collègue de Beauséjour--Petitcodiac pour son excellent discours. J'aimerais aussi exprimer la sympathie que j'éprouve à l'égard des Acadiens.
[Traduction]
Une injustice grave a été commise contre les Acadiens au pays de 1755 à 1763. Quelque 13 000 d'entre eux ont été déportés dans des régions aussi lointaines que la Georgie et le Massachusetts pour des raisons connues qu'à l'époque. La motion appelle aux redressements. Elle invite le gouvernement britannique à s'excuser pour des décisions prises il y a environ 250 ans.
Je reconnais mon erreur. La motion a été modifiée et invite le gouvernement britannique à faire une déclaration au sujet des événements. La motion originale demandait des excuses. Je voudrais intervenir sur cette question.
Nous n'avons aucune difficulté à exprimer nos sympathies les plus sincères et les plus profondes face aux événements survenus durant cette époque sombre il y a quelque 250 ans. Nous les désapprouvons et les déplorons. Nous nous assurerons avec tous les moyens à notre disposition que cela ne se reproduise jamais. Comme le député de Beauséjour--Petitcodiac l'a indiqué, nous sympathisons avec la population acadienne.
Les Acadiens méritent de l'admiration pour leur comportement depuis 250 ans. La richesse de leur culture et de leur langue fait qu'ils comptent parmi les meilleurs éléments dont le pays puisse s'enorgueillir. Les Acadiens font partie de la merveilleuse mosaïque canadienne et en constituent un élément extrêmement important.
Ceux qui sont séparatistes dans la province de Québec auraient intérêt à tirer des enseignements du courage et de la dignité manifestés par les Acadiens au Canada. Les Acadiens sont des membres à part entière, indispensables, estimés et honorés de la société canadienne. Ils constituent un groupe qui nous a beaucoup appris et qui continue d'enrichir le Canada et les Canadiens d'un océan à l'autre. Je parle en tant que personne originaire de la Colombie-Britannique.
Le meilleur moyen de redresser les torts passés est d'investir dans l'avenir. Il ne sert à rien de revenir sur les siècles précédents pour réparer ces injustices. Toutefois, cela permet de rendre justice à ceux qui ont été victimes d'atrocités. La société d'aujourd'hui doit tirer des enseignements de ces injustices et veiller à ce que celles-ci ne se reproduisent plus jamais.
Au vu de nos ressources limitées, il serait productif et avisé de mettre à contribution ces mêmes ressources pour lutter contre les préjugés et la discrimination et nous assurer que les torts passés ne se répéteront ni aujourd'hui ni dans l'avenir.
Comme l'a indiqué le député du NPD, je veux à mon tour attirer l'attention de la Chambre sur le sort des autochtones. Le peuple autochtone est aujourd'hui victime de graves injustices dans nos localités. Au lieu de chercher à réparer les injustices du passé, ne serait-il pas plus avisé de mettre à profit les ressources limitées dont nous disposons pour améliorer le sort des autochtones qui se trouvent au bas de l'échelle socio-économique dans la société d'aujourd'hui? Ce serait faire une utilisation judicieuse de nos efforts et de nos ressources financières et un bon moyen de jeter des ponts entre les individus.
Nous ne pouvons pas vivre dans le passé, même si certains le voudraient. Certains groupes se plaisent à ressasser les injustices passées et utilisent ce moyen pour renforcer la solidarité du groupe. Le fait de ressasser les injustices du passé n'est-il pas un moyen superficiel de solidariser des individus ou un groupe? N'est-il pas plus noble et plus productif de nous tourner vers l'avenir et de nous demander comment faire pour nous donner des lendemains meilleurs et plus sûrs pour tous?
Comment favoriser la tolérance et la compréhension? Comment assurer la survie de notre patrimoine culturel et linguistique? Aux personnes qui souhaiteraient se séparer du Canada, je rappelle que la plus grande force de la population francophone consiste aujourd'hui à demeurer dans le giron du Canada. La meilleure protection que l'on puisse offrir à la langue française et à la culture francophone est de les conserver au sein du Canada.
La séparation est probablement la plus grande menace qui pèse sur la langue française et la culture française en Amérique du Nord à l'heure actuelle. Ceux qui choisissent de séparer certaines régions, en particulier le Québec du Canada, feraient bien de tenir compte de cette leçon.
Je voudrais ensuite parler de l'histoire. Il n'y a aucune cohérence dans la façon dont l'histoire est enseignée dans notre pays à l'heure actuelle. Il y a souvent des lacunes au plan factuel. L'histoire n'est pas assez enseignée dans nos écoles. Jack Granatstein, qui est le conservateur du Musée canadien de la guerre, a parlé de façon éloquente à de nombreuses reprises de l'importance de l'histoire au Canada et du fait qu'elle est mal enseignée dans toutes les régions du pays.
Nous ferions bien de collaborer avec les ministres provinciaux de l'éducation pour élaborer un programme commun d'histoire qui soit cohérent, factuel et enseigné dans toutes les régions du pays. Comment pouvons-nous aller de l'avant et vivre aujourd'hui sans savoir d'où nous venons? Nous sommes très injustes à l'égard des étudiants de notre pays et, en fait, de tous les Canadiens si nous ne leur donnons pas une bonne connaissance de notre histoire.
Tous les ans, nous disons « jamais plus » alors que nous commémorons comme il se doit le génocide et les injustices qui ont accompagné l'holocauste en Europe contre les juifs et d'autres minorités. Pourtant, nous n'avons pas tiré les leçons voulues. Tandis que nous parlons, les mêmes atrocités qui ont eu lieu en Europe durant l'holocauste et dont la population acadienne a été victime de 1755 à 1762 se déroulent de nos jours.
On assiste à des génocides. Les gens sont déplacés de leurs terres et assassinés, que ce soit au Zimbabwe, au Libéria, dans la République démocratique du Congo, au Burundi ou au Rwanda. Cela se produit sans cesse à notre époque. Nous nous tordons les mains de désespoir, impuissants, et nous nous demandons pourquoi nous ne faisons rien alors que le sang coule. Nous n'avons rien appris de l'histoire.
Il y a un point central que je vais défendre dans ce discours. Il faut examiner l'histoire. Nous devons tirer des leçons de l'histoire et nous devons agir. Il ne suffit pas de présenter des excuses pour ce qui s'est produit il y a 50 ou 250 ans. Nous sommes injustes à l'égard de ces gens si nous n'apprenons pas de leurs tragédies, de leurs terribles difficultés et des atrocités dont ils ont été victimes. Nous devons tirer les leçons qui s'imposent, trouver des solutions et agir si nous voulons nous assurer que de telles atrocités, de tels actes de brutalité, de telles violations des droits de la personne et des déportations massives de ce genre ne se reproduisent plus.
On assiste à cela en ce moment même. On ne peut permettre que cela se poursuive. Je demande au gouvernement de collaborer avec la communauté internationale pour réparer les injustices passées. Je demande au gouvernement de se tourner vers l'avenir et de trouver des solutions de façon multilatérale pour empêcher que de telles injustices ne se produisent, maintenant et à l'avenir.
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