Bradshaw et LeBlanc s'opposent à la motion d'excuses pour la Déportation

10 juillet 2001

Philippe Ricard, L'Acadie Nouvelle

MONCTON - Après les députés Jeannot Castonguay et Robert Thibeault, c'est au tour de Claudette Bradshaw et Dominic LeBlanc de se prononcer contre la motion privée du député bloquiste Stéphane Bergeron, qui vise à demander des excuses à la Couronne britannique pour les torts causés au peuple acadien lors de la Déportation de 1755.

Lorsque interrogée à ce sujet vendredi dernier, la députée de Moncton-Riverview-Dieppe et ministre fédéral du Travail, Claudette Bradshaw, s'est dit, entre autres, outrée de la façon dont M. Bergeron a voulu «utiliser» le peuple acadien. Selon Mme Bradshaw, la motion privée du député bloquiste a été déposée uniquement pour des raisons de nature politique, et non pas pour des raisons personnelles, comme ce dernier le prétend depuis le début. «Ce qui nous a surpris, c'est que M. Bergeron a fait ça sans en parler à la SNA, ni à la SAANB. Franchement, en tant qu'Acadiens, on a été un peu insulté. Moi, comme Acadienne, je travaille de près avec les groupes acadiens. Le fait que M. Bergeron ne nous en a jamais parlé et le fait qu'il en a jamais parlé avec la SNA ou la SAANB, il faut que tu te poses la question à savoir si la décision qu'ils ont prise était de nature politique. Je ne voudrais jamais voir les Acadiens être utilisés pour des choses politiques. On ne joue pas de jeu avec les cultures acadiennes, surtout pas des séparatistes», a lancé la ministre du Travail, visiblement irritée de l'initiative du député de Verchères-Les Patriotes. De son côté, le député de Beauséjour-Petitcodiac et président du caucus libéral de l'Atlantique, Dominic LeBlanc, a tenu presque mot pour mot le même discours que son collègue Robert Thibeault. «Je n'ai pas beaucoup de choses à dire là-dessus. Je crois qu'on n'a pas besoin comme pays et comme peuple acadien d'aller quêter des excuses de la Couronne britannique. Je trouve ça un peu désagréable. Demander à une génération de donner des excuses pour des actes qui ont été posés par des gens de plusieurs générations passées, je ne pense pas que ça va donner grand-chose», a-t-il laissé tomber. Pour M. LeBlanc, la motion privée de M. Bergeron n'est pas un sujet qui soulève de grandes passions chez ses électeurs, ce qui pourrait expliquer ses prises de position actuelles. «Dans mon bureau de comté à Shédiac, je rencontre des gens tous les jours et ils ne m'en parlent pas de ça. Des excuses de la Couronne britannique, ça ne va pas régler la question de la pêche autochtone et ça ne va pas aider des étudiants à se trouver un emploi d'été», explique M. LeBlanc. Cependant, le fils de Roméo LeBlanc affirme qu'il s'est engagé auprès de la SNA à avoir l'esprit ouvert dans ce dossier. M. LeBlanc dit qu'il est intéressé à lire le rapport qu'un groupe d'experts rédigera pour la SNA, sur la question de la Déportation. Ce rapport devrait être prêt l'automne prochain, un peu avant que la Chambre des communes se prononce sur la motion déposée par Stéphane Bergeron. «J'ai rencontré la SNA, et je leur ai dit que j'étais intéressé à voir le rapport qu'ils vont faire. Je me suis engagé à avoir l'esprit ouvert pour voir ce que leur rapport va dire. Je ne vais pas prendre une décision finale sur cette question avant de voir le rapport. Mais, comme point de départ, je ne suis pas beaucoup intéressé à ce sujet-là. Mais ça ne serait pas généreux de ma part de dire que je me suis fait une idée», de préciser M. LeBlanc. À l'instar de sa collègue Claudette Bradshaw, le député de Beauséjour-Petitcodiac croit à une machination du Bloc québécois contre le gouvernement fédéral et contre le peuple acadien. «La réalité, c'est que c'est un truc politique des séparatistes du Québec. Comme Acadiens, comme francophones hors-Québec, une des pires choses qui pourraient nous arriver, ça serait la séparation du Québec. L'objectif de Bergeron, dans sa vie publique, c'est de diviser le pays. Moi, je pense que la séparation (du Québec) pourrait avoir des répercussions beaucoup plus graves pour les francophones hors-Québec, que de ne pas avoir des excuses de la reine d'Angleterre», allègue M. LeBlanc. Quant à Mme Bradshaw, elle explique que la motion qui exigerait des excuses de la Couronne britannique aurait pu être déposée par son parti qui, lui, aurait consulté les instances qui représentent les Acadiens. «Possiblement, si on avait travaillé avec la SNA ou la SAANB. On ne leur a jamais dit non à aucune réunion. À toutes les fois qu'ils m'ont appelé, comme ministre régional, j'ai toujours été là pour eux autres et je serai toujours là pour eux autres. Il n'y a pas de plus grosse Acadienne que moi. Et j'ai été franchement insultée», a-t-elle répété.