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La reine relègue à Ottawa le dossier des torts causés par la Déportation
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Philippe Ricard - 25 septembre 2003
OTTAWA - Invitée par la Société nationale des Acadiens à reconnaître les torts causés par la Déportation, la Couronne britannique a renvoyé la balle dans le camp du gouvernement fédéral qui pèse maintenant la délicate question.
Philippe Ricard L'Acadie NOUVELLE philippe.ricard@acadienouvelle.com
Dans une lettre adressée au président de la SNA, Euclide Chiasson, le 18 juin dernier, mais rendue publique hier, le secrétaire particulier adjoint de la reine, Stuart Shilson, affirme que ce sera aux ministres canadiens de trancher sur la question. «Je m'excuse du long délai qu'a exigé une réponse adéquate à votre requête. Toutefois, il s'agit d'une question à propos de laquelle La reine, en tant que Souveraine d'une monarchie constitutionnelle, doit être conseillée par ses ministres canadiens. Je n'ai aucun doute que les ministres de Sa Majesté sont au courant de vos démarches auprès de La reine à cet égard et des points que vous avez soulevés», peut-on lire. Pour le président de la SNA, il est clair que c'est maintenant à Ottawa que l'on devra prendre une décision. La missive en main, M. Chiasson, a relayé le dossier au ministre et président du conseil privé, Stéphane Dion, en août dernier. Depuis, le dossier a fait un bout de chemin et il ferait l'objet d'une réflexion au sein des membres du cabinet de Jean Chrétien. Et, selon M. Chiasson, les Acadiens seraient plus proches que jamais d'obtenir la reconnaissance historique qu'ils recherchent. «Il s'agit tout simplement d'une volonté politique. On pense qu'elle est là maintenant, du moins c'est ce qu'on nous laisse entendre», a-t-il expliqué lors d'une entrevue téléphonique. «On va, d'après nous, obtenir gain de cause après 250 ans», a-t-il ajouté. Deux ministres fédéraux sont impliqués dans le dossier, soit M. Dion et la ministre du Patrimoine canadien, Sheila Copps. «M. Dion a consulté le premier ministre et les députés acadiens lors de la rentrée parlementaire. Comme on l'a constaté à la suite des propos de Dominic LeBlanc, il y a une ouverture», affirme M. Chiasson. «Mme Copps est aussi impliquée là-dedans parce que c'est elle qui est responsable du protocole avec la Couronne. Elle aussi, elle veut que cette question aboutisse», d'ajouter M. Chiasson. Une rencontre devrait d'ailleurs avoir lieu à ce sujet entre la SNA et Mme Copps au début d'octobre, à Ottawa.
Motion M-382
Le député du Bloc québécois, Stéphane Bergeron, qui s'appuie sur une certaine ouverture du gouvernement lors du débat suscité par sa motion sur le sujet, vendredi dernier, est également optimiste. Prenant la parole au nom du gouvernement, Carole-Marie Allard, secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine, a exprimé des réserves envers le texte soumis. Par contre, elle a mentionné que «si le gouvernement du Canada doit poser un geste, il faudrait que ce geste vienne du cabinet fédéral. C'est ce gouvernement qui pourrait alors s'adresser au chef d'État, la reine Elisabeth II (...) pour lui demander de prendre les mesures jugées pertinentes». En l'absence des ministres Sheila Copps et Stéphane Dion, mercredi, Mme Allard a refusé de commenter sur le sujet. De l'avis du député Bergeron, cette petite phrase prononcée aux Communes est la preuve que le fédéral s'apprête à bouger. D'autant plus, ajoute-t-il, que la motion sera soumise au vote dans un peu plus d'un mois. Qu'arrivera-t-il de la motion? Il se pourrait bien qu'elle soit battue, soutient Euclide Chiasson. «Cette motion est complètement parallèle à notre démarche. On peut donner le crédit à M. Bergeron parce qu'il est revenu à la charge plusieurs fois. Je lui lève mon chapeau pour ça. Mais après la défaite de la motion M-241 (décembre 2001), on a décidé que nous allions piloter le dossier et notre démarche est indépendante de la sienne. Notre démarche vient du peuple acadien», explique-t-il. «C'est possible que la motion M-382 soit battue. Mais pour nous, ça ne pose pas problème si on obtient gain de cause en bout de ligne. Dans le fond, la motion comme telle n'a pas d'importance. Ce qui est important, ce sont les résultats», argue le président de la SNA. D'autres versions de la motion du député de Verchères-Les-Patriotes, soumises antérieurement à un vote aux Communes, ont toujours été défaites par les libéraux. De nombreux députés acadiens avaient même refusé d'appuyer la démarche, notamment parce qu'elle provenait du Bloc, ce qui les avait placés dans une situation peu confortable. Face à cette attitude partisane, la SNA avait décidé de mener elle même sa barque. La SNA espère maintenant que le changement de direction à la tête du gouvernement ne viendra pas nuire à leur cause. «On veut que ce soit réglé avant que M. Chrétien parte. On compte sur son leadership», a mentionné M. Chiasson. Si Ottawa décidait de donner suite aux demandes des Acadiens, la Couronne britannique pourrait procéder par l'entremise d'une proclamation royale qui reconnaîtrait les préjudices commis envers les Acadiens lors du Grand Dérangement. La proclamation pourrait coïncider soit avec l'anniversaire du 250e anniversaire de la promulgation de l'ordre de la Déportation, en septembre 1755, soit avec le 400e anniversaire de présence francophone en Amérique, l'an prochain. Mais pas besoin d'un anniversaire pour agir, souligne le président de la SNA, qui accepterait dès maintenant la reconnaissance tant attendue.
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