LA SNA DEMANDERA À LA COURONNE BRITANNIQUE DE RECONNAÎTRE OFFICIELLEMENT LES TORTS HISTORIQUES INFLIGÉS AUX ACADIENS

RADIO-CANADA ATLANTIQUE, LE CE SOIR, le 12 juin 2002

Animateur : ABBÉ LANTEIGNE

ABBÉ LANTEIGNE : Mesdames et messieurs, on dira peut-être que les Acadiens ont la tête dure, mais on ne pourra certainement pas leur reprocher d'avoir lâché prise dans le dossier des torts causés par la Couronne britannique lors de la Déportation. La Société nationale de l'Acadie enverra une requête à la reine Elizabeth II dans les prochains jours pour lui demander de reconnaître les torts causés aux Acadiens lors de la Déportation. La lettre sera envoyée à la gouverneure générale du Canada, Adrienne Clarkson, qui transmettra la missive à la reine. La SNA poursuit en ce sens la démarche du député bloquiste Stéphane Bergeron dont la motion a été rejetée par le Parlement canadien.

EUCLIDE CHIASSON : J'ai par la présente l'honneur et le privilège de faire appel à votre sentiment unanimement reconnu de justice et de compassion...

JULIE DESAUTELS : C'est en ces termes que la Société nationale de l'Acadie s'adresse à la Couronne britannique pour qu'elle reconnaisse les torts causés durant la période de Déportation qui s'étend de 1755 à 1763. Dans la lettre paraphée par la SNA et plusieurs associations acadiennes, on y dit que durant cette période des milliers d'Acadiens ont perdus leurs terres, leurs familles et leur communautés et des milliers d'autres sont morts inutilement de froid et de faim en raison de ces événements tragiques. La SNA après consultation avec des experts n'exige pas d'excuses, ni de compensations financières, mais demande que l'on reconnaisse les torts infligés au peuple acadien.

MAURICE BASQUE : Il faut comprendre que la démarches des Acadiens, bien sur, à l'heure actuelle, elle est tout à fait semblable à celle qui se passe dans plusieurs sociétés en occident ou même à travers le monde.

KAMEL KIHARI : Dans le passé, dans un passé récent, la monarchie britannique a fait ce genre de geste, notamment vis-à-vis du peuple Maori en Nouvelle-Zélande, ça c'est passé en Inde…

JULIE DESAUTELS : Cette démarche se vent le dénouement d'un long processus entamé il y plus d'un siècle. L'avocat de la Louisiane Warren Perrin, qui avait déposé une pétition en 1990 a fusionné sa demande à celle de la SNA. Le député bloquiste Stéphane Bergeron, dont la motion a été battue à la Chambre des communes, s'est rallié lui aussi. Pour le président, la démarche en vaut la chandelle.

EUCLIDE CHIASSON : Le faite que la Couronne britannique reconnaîtrait les torts qu'ont subi les Acadiens, je crois que pour certains d'eux autres ça va être en même temps l'acceptation qu'il y a un peuple qui s'appelle le peuple acadien.

JULIE DESAUTELS : Selon la Société nationale de l'Acadie, le troisième Congrès mondial en 2004 serait le moment idéal de la tenue d'une cérémonie à Grand-Pré en Nouvelle-Écosse, Grand-Pré étant le symbole de la Déportation des Acadiens. Sophie Desautels, Radio-Canada, Moncton.

ABBÉ LANTEIGNE : Et pour en connaître un peu plus sur le sujet, je vous présenterai une entrevue avec le président de la SNA, Euclide Chiasson un peu plus tard à l'émission.

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ABBÉ LANTEIGNE : Comme on l'a vu tout à l'heure la Société nationale de l'Acadie demandera à la Couronne britannique de reconnaître officiellement les torts historiques infligés aux Acadiens au moment de la Déportation. J'en ai discuté un peu plus tôt avec le président de la SNA, Euclide Chiasson.

ABBÉ LANTEIGNE : Monsieur Chiasson, bonsoir.

EUCLIDE CHIASSON : Bonsoir

ABBÉ LANTEIGNE : Pourquoi demander une reconnaissance des torts causés aux Acadiens au lieu tout simplement demander des excuses à la Couronne britannique?

EUCLIDE CHIASSON : Bien, c'est une question de degré. Premièrement, on ne veut pas embarrasser personne. Et puis, le fait de reconnaître les torts, c'est déjà beaucoup et après si elle veut s'excuser, elle pourra bien le faire. Mais pour nous, l'important, c'est la reconnaisse historique des torts qui ont été causées au peuple acadien.

ABBÉ LANTEIGNE : Est-ce que les Acadiens ont reculé devant la défaite, par exemple, au Parlement de la motion M-241 qui demandait des excuses ? Est-ce que l'on a décidé, est-ce que c'est un repli stratégique de la part des Acadiens?

EUCLIDE CHIASSON : Pas du tout, au contraire, parce que le dossier maintenant est sorti de l'arène politique et il est devenu un dossier de la société civile, donc du peuple acadien, et dans son ensemble, à plus et des membres associés de la Louisiane, de la France, Saint-Pierre et Miquelon, les îles de la Madeleine, Donc, le dossier est maintenant dans les mains des Acadiens, et puis ça s'est très bien passé. L'autre chose qui est différente par rapport à la motion de monsieur Bergeron, c'est que ce n'est pas au gouvernement canadien que l'on s'adresse, on s'adresse à la Couronne directement, à la reine puisque c'est la Couronne britannique qui était responsable et non pas le gouvernement canadien.

ABBÉ LANTEIGNE : Mais une reconnaissance des torts. On peut très bien reconnaître des torts mais sans nécessairement le regretter. Qu'est-ce que cela va amener ?

EUCLIDE CHIASSON : Bien! Disons, dans la façon d'exprimer cette reconnaissance là, la reine pourra choisir la façon qu'elle veut. Évidemment, le geste va être symbolique et selon l'utilisation, est-ce que ça va être une lettre qu'elle va nous envoyer, est-ce que ça va être une gerbe sur un stèle quelque part dans le monde. Ça peut prendre toute sorte de formes. L'important c'est que se soit reconnu, et pour nous, on a faite notre travail. La lettre doit partir la semaine prochaine avec un document qui l'accompagne qui explique toute la situation et avec la signature originale de tous les présidents de nos associations membres. Alors, avec ça, il n'y certainement pas de division sur cette question là.

ABBÉ LANTEIGNE : Est-ce que ça n'aurait pas eu plus de poids si on avait demandé à la gouverneure générale d'approcher la reine sur cette question là? Là, c'est la gouverneur générale, si je comprend bien, qui va donner la lettre à la reine.

EUCLIDE CHIASSON : Oui, ce qu'on fait c'est qu'on utilise (pas terminé), parce que dans le fond, c'est à la reine que l'on s'adresse. Alors, on va utiliser, demander à Mme Clarkson d'être le conduit, parce que on voudrait utiliser la valise diplomatique de la gouverneure générale pour se rendre à Londres.

ABBÉ LANTEIGNE : Mais la gouverneure générale ne va pas intervenir d'aucune façon non plus?

EUCLIDE CHIASSON : Pas du tout, excepté que, elle va être au courant du contenu de la lettre et les documents. Évidemment, elle ne va pas livrer n'importe quoi à la reine, et puis, on ne peut pas voir qu'elle refuserait d'être ce conduit là, elle représente qu'en même le peuple canadien.

ABBÉ LANTEIGNE : Là dessus, je vous remercie beaucoup monsieur Chiasson.

EUCLIDE CHIASSON : Ça ma fait plaisir.

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